CE, 6 décembre 2017, n° 405841

M. B., fonctionnaire du ministère des affaires étrangères, n’a pas reçu de nouvelle affectation suite à la fin de ses fonctions d’ambassadeur de France en Ouzbékistan, en 2010.  Au bout de trois ans sans affectation, il a postulé à plusieurs postes susceptibles de se libérer au cours de l'année 2013 et sollicité, à défaut, une autre affectation sur un poste correspondant à son grade. Ces demandes sont restées sans réponse.

Il a saisi le tribunal administratif de Paris, qui a annulé la décision implicite du ministre des affaires étrangères refusant de lui proposer une affectation, enjoint au ministre de lui proposer dans un délai d'un mois une affectation correspondant à son grade et condamné l'État à lui verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral.

La cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de M.B., annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'État à l'indemniser du préjudice matériel résultant de la perte de primes et indemnités diverses et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 88 479,10 euros en réparation de ce préjudice, en estimant à trois mois le délai raisonnable dont disposait l'administration pour proposer à M. B. une affectation correspondant à son grade.

Le ministre des affaires étrangères s'est pourvu en cassation.

Le Conseil d’État rappelle que tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade.

Il considère « qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un fonctionnaire qui a été irrégulièrement maintenu sans affectation a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de son maintien illégal sans affectation ; que pour déterminer l'étendue de la responsabilité de la personne publique, il est tenu compte des démarches qu'il appartient à l'intéressé d'entreprendre auprès de son administration, eu égard tant à son niveau dans la hiérarchie administrative que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans exercer aucune fonction ; que dans ce cadre, sont indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente un lien direct de causalité ; que, pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause qui débute à la date d'expiration du délai raisonnable dont disposait l'administration pour lui trouver une affectation, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ».

En l’espèce compte tenu du grade de M.B., du faible nombre d'emplois correspondant à celui-ci et de l'organisation des mutations au ministère des affaires étrangères, la haute juridiction estime que le délai raisonnable dont disposait l'administration pour proposer à l'intéressé un nouvel emploi peut être d’une année.

Ainsi, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de qualification juridique en estimant ce délai à trois mois.

Le préjudice matériel subi par M. B. à raison de la perte d'une chance sérieuse de percevoir certaines primes et indemnités, est cependant ramené à 67 713, 60 euros.

 
Notes
puce note CE, 6 décembre 2017, n° 405841
 
 
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Droit à crédit d'heures des titulaires de mandats locaux

Le décret n° 2015-1352 du 26 octobre 2015 relatif au crédit d'heures des titulaires de mandats municipaux et communautaires, pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leurs mandats, modifie le code général des collectivités territoriales et le code des communes de la Nouvelle-Calédonie afin de fixer le crédit d’heures dont peuvent disposer les conseillers municipaux des communes et communautés de moins de 3 500 habitants qui ne pouvaient, jusqu’à présent en bénéficier. Ce crédit d’heures, accordé par l’employeur, se monte à sept heures par trimestre sauf pour les élus de Polynésie, Mayotte et Nouvelle-Calédonie qui disposent de sept heures trente en raison de règles de calcul différentes. Le présent texte entre en vigueur le 1er janvier 2016.
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