Un agent qui refuse la transformation de son CDD en CDI pour un motif légitime ne peut pas être considéré comme involontairement privé d’emploi, si le motif légitime est justifié par l’employeur
Madame A., agent contractuelle relevant du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, a exercé ses fonctions dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée (CDD) qui prévoyaient son affectation dans un unique établissement. À l’occasion du renouvellement de son dernier contrat, il lui a été proposé de transformer celui-ci en un contrat à durée indéterminée (CDI), en vertu duquel son affectation « serait déterminée et modifiée par le recteur compte tenu des besoins du service ». Madame A. a refusé le bénéfice de ce CDI et demandé que lui soit versée l’allocation d’assurance pour perte d’emploi. Cette demande lui a été refusée par le ministre.
Madame A. a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Grenoble. Le ministre s’est pourvu en cassation contre le jugement du tribunal administratif devant le Conseil d’Etat qui a annulé sa décision.
Le Conseil d’Etat rappelle au préalable, d’une part, les conditions d’octroi de l’allocation d’assurance, définies par les articles L. 5422-1 et L. 5424-1 du code du travail et, d’autre part, les dispositions applicables au renouvellement des CDD, issues de l'article 8 de la loi n°2012-347 du 12 mars 2012. Il en déduit que l'agent qui remplit les conditions d’octroi de l’allocation chômage mais « qui refuse la transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime. Un tel motif peut être lié notamment à des considérations d'ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle par l'employeur sans justification. ». Faisant application de ce principe au cas d’espèce, il confirme que le fait qu’il ait été stipulé dans son contrat que l’affectation géographique de l’intéressée pourrait être modifiée par le recteur d’académie pour tenir compte des besoins du service constitue à lui seul une modification substantielle du contrat de l’intéressée. Cependant, contrairement aux juges du fond, il estime que l’intéressée n’aurait pas dû pour autant être considérée comme involontairement privée d’emploi « dès lors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cette modification était nécessaire compte tenu des conditions d'emploi des professeurs sous contrat à durée indéterminée, lesquels ont vocation à enseigner dans l'ensemble des établissements du ressort de l'académie en fonction des besoins du service. »
Statuant au fond, le Conseil d’Etat juge que le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse est fondé à demander l’annulation de la décision qu’il conteste.
Madame A. a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Grenoble. Le ministre s’est pourvu en cassation contre le jugement du tribunal administratif devant le Conseil d’Etat qui a annulé sa décision.
Le Conseil d’Etat rappelle au préalable, d’une part, les conditions d’octroi de l’allocation d’assurance, définies par les articles L. 5422-1 et L. 5424-1 du code du travail et, d’autre part, les dispositions applicables au renouvellement des CDD, issues de l'article 8 de la loi n°2012-347 du 12 mars 2012. Il en déduit que l'agent qui remplit les conditions d’octroi de l’allocation chômage mais « qui refuse la transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime. Un tel motif peut être lié notamment à des considérations d'ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle par l'employeur sans justification. ». Faisant application de ce principe au cas d’espèce, il confirme que le fait qu’il ait été stipulé dans son contrat que l’affectation géographique de l’intéressée pourrait être modifiée par le recteur d’académie pour tenir compte des besoins du service constitue à lui seul une modification substantielle du contrat de l’intéressée. Cependant, contrairement aux juges du fond, il estime que l’intéressée n’aurait pas dû pour autant être considérée comme involontairement privée d’emploi « dès lors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cette modification était nécessaire compte tenu des conditions d'emploi des professeurs sous contrat à durée indéterminée, lesquels ont vocation à enseigner dans l'ensemble des établissements du ressort de l'académie en fonction des besoins du service. »
Statuant au fond, le Conseil d’Etat juge que le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse est fondé à demander l’annulation de la décision qu’il conteste.
Notes
Décision CE n° 408514 du 8 novembre 2019, mentionnée aux Tables du Recueil Lebon |
AJDA n° 29 / 2017 - 11 septembre 2017, "Durée de services publics effectifs : une application audacieuse de la loi "Sauvadet" - La cour administrative d'appel de Douai juge que les périodes d'activité professionnelle effectuées pendant au moins six ans par un agent territorial auprès de deux employeurs publics, avec les mêmes missions et objectifs, et sur un même lieu de travail, justifient l'application de la loi du 12 mars 2012. Et ce, alors même que certaines de ces périodes ont été exécutées sous contrat emploi solidarité, contrat de droit privé" , conclusions de Monsieur Hadi Habchi, rapporteur public dans l'affaire CAA de Douai, 1er juin 2017, n° 15DA00920, pp. 1684 à 1687
La Semaine juridique, n° 19 - 15 mai 2017 "Une erreur sur le décompte des jours de congés n'entraîne pas nécessairement l'annulation de toute la procédure de licenciement", par Laurence Marion, rapporteur public dans l'affaire CE, 15 mars 2017, n° 390757, (commentée dans Vigie n° 90 - Avril 2017), pp. 35 à 36
AJDA n° 19 / 2017 - 29 mai 2017, "Le contentieux du licenciement pour perte d'emploi des contractuels : l'un et le multiple", commentaire de l'avis du CE, 23 décembre 2016, n° 402500, (commenté dans Vigie n° 87 - Janvier 2017), par Sylvain Niquège, pp. 1132 à 1135
La Semaine juridique, n° 21 - 29 mai 2017 "La titularisation des contractuels des collectivités territoriales par la voie de la sélection professionnelle", Conclusions de Denis Perrin, rapporteur public dans l'affaire du TA de Lille, 13 décembre 2016, n° 1601200, pp. 38 à 40.
(La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, a mis en place des procédures de titularisation des contractuels par la voie notamment d’une sélection professionnelle.
(La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, a mis en place des procédures de titularisation des contractuels par la voie notamment d’une sélection professionnelle.
Dans ce cadre, il appartient à chaque collectivité de fixer le nombre d’emplois ouverts par grade dans un programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire. Une commission de sélection professionnelle dresse, selon l’article 20 de la loi, la liste des agents aptes à être intégrés en tenant compte des objectifs du programme pluriannuel d'accès à l’emploi titulaire.
Le tribunal a précisé le régime juridique de cette voie d’accès à la fonction publique :
- il a d’abord jugé que la décision de la commission de sélection fixant cette liste est susceptible de recours ;
- il a ensuite considéré que la commission ne pouvait déclarer apte un nombre de candidats supérieurs au nombre de postes ouverts).
AJDA, n° 27/2016 - 25 juillet 2016, " Licenciement justifié d'un directeur de la culture pour insuffisance managériale", conclusions prononcées par Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public dans l'affaire du CE 20 mai 2016, n° 387105, (commentée dans Vigie n° 81 - Juin 2016), pp. 1533 à 1535
La Semaine juridique, n° 27 - 11 juillet 2016, " Qui assistera les assistants familiaux lors de l'entretien préalable à son licenciement ? ", conclusions prononcées par Gaëlle Dumortier, rapporteur public dans l'affaire du CE 30 mai 2016, n° 381274, (commentée dans Vigie n° 81 - Juin 2016), pp. 28 à 30
La Semaine juridique, n° 28 - 18 juillet 2016, " Reclassement d'un agent recruté par CDI : obligation, dans tous les cas, de maintenir la durée indéterminée du contrat ", conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE 13 juin 2016, n° 387373, (commentée dans Vigie n° 82 - Juillet 2016), pp. 27 à 30
La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 374015 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "CDD conduisant, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale de six ans prévue à l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 : pas de requalification en CDI ", pp.40 à 44
La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 375730 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "Recrutement sur les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 47 de la loi du 26 janvier 1984 : le recours au CDI est possible", pp. 44 à 47