TC, 3 juillet 2017, n° 4091

M. C., exerçant, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée les fonctions de directeur d’un l'hôpital privé, s'est vu proposer, à la suite du transfert des activités de cet établissement à un centre hospitalier régional (CHR), un contrat de droit public à durée indéterminée en application des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail. Il a refusé de signer le contrat proposé au motif que celui-ci apportait des modifications substantielles à son contrat de travail. Le  CHR a, par la suite, procédé à son licenciement.

Il a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande indemnitaire en invoquant l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, lequel a sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la question préjudicielle de la conformité de la proposition de contrat de droit public faite par le CHR aux dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail.

Le tribunal administratif de Strasbourg a déclaré que la proposition de contrat de droit public n'était pas conforme à l'article L. 1224-3 du code du travail en jugeant notamment qu'elle ne reprenait pas la clause substantielle relative aux fonctions exercées qui figurait dans son contrat de travail.

Le Conseil d’État, saisi par le CHR, a renvoyé l’affaire au Tribunal des conflits afin de désigner l’ordre de juridiction compétent pour déterminer, d’une part, si le contrat de droit public reprenait les clauses substantielles du contrat de travail de l’intéressé et, d’autre part, si les dispositions législatives et réglementaires régissant le recrutement de contractuels par les établissements publics de santé ou des considérations liées à l’organisation du service public faisaient obstacle au recrutement de l’intéressé par un contrat à durée indéterminée sur un emploi de directeur adjoint chargé du site sur lequel il travaillait précédemment.

Le tribunal des conflits a considéré que « le juge judiciaire, saisi d'un litige relatif à la rupture du contrat de travail consécutive au refus du salarié d'accepter l'offre de la personne publique, a ainsi compétence pour apprécier si cette offre reprend les clauses substantielles du contrat dont le salarié est titulaire ; que, lorsqu'il constate qu'elle ne reprend pas ces clauses et que la personne publique soulève une contestation sérieuse en se prévalant de dispositions régissant l'emploi des agents publics ou de conditions générales de leur rémunération faisant obstacle à leur reprise, le juge judiciaire doit surseoir à statuer jusqu'à ce que la question préjudicielle relative au bien-fondé des motifs invoqués par la personne publique soit tranchée par la juridiction administrative, à moins qu'il apparaisse manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que ces motifs sont ou ne sont pas fondés ».

En l’espèce le juge judiciaire était donc seul compétent pour apprécier la teneur de l'offre faite à M. C. par le CHR et, notamment, si elle reprenait les clauses substantielles du contrat le liant à l'hôpital privé et « la saisine du juge administratif impliquait qu'il ait préalablement constaté l'absence de reprise de ces clauses et qu'il ait été confronté, au vu des éléments invoqués par la personne publique pour la justifier, à une contestation sérieuse ».

 
Notes
puce note TC, 3 juillet 2017, n° 4091
 
 
La Semaine juridique, n° 21 - 29 mai 2017 "La titularisation des contractuels des collectivités territoriales par la voie de la sélection professionnelle", Conclusions de Denis Perrin, rapporteur public dans l'affaire du TA de Lille, 13 décembre 2016, n° 1601200, pp. 38 à 40.

(La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, a mis en place des procédures de titularisation des contractuels par la voie notamment d’une sélection professionnelle.

Dans ce cadre, il appartient à chaque collectivité de fixer le nombre d’emplois ouverts par grade dans un programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire. Une commission de sélection professionnelle dresse, selon l’article 20 de la loi, la liste des agents aptes à être intégrés en tenant compte des objectifs du programme pluriannuel d'accès à l’emploi titulaire.

Le tribunal a précisé le régime juridique de cette voie d’accès à la fonction publique :

- il a d’abord jugé que la décision de la commission de sélection fixant cette liste est susceptible de recours ;
- il a ensuite considéré que la commission ne pouvait déclarer apte un nombre de candidats supérieurs au nombre de postes ouverts).

La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 374015 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "CDD conduisant, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale de six ans prévue à l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 : pas de requalification en CDI ", pp.40 à 44 
La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 375730 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "Recrutement sur les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 47 de la loi du 26 janvier 1984 : le recours au CDI est possible", pp. 44 à 47
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