La différence de traitement entre agents publics à durée déterminée et à durée indéterminée concernant l’attribution d’une indemnité est légitime au regard de leur différence de situation

Le litige opposait la municipalité de Madrid à l'un de ses agents, Madame BM, engagée comme agent non titulaire pour couvrir un poste vacant jusqu'à ce qu'il soit pourvu par la nomination d'un fonctionnaire. Madame BM ayant été informée que son poste avait été pourvu par un fonctionnaire et qu'il était mis fin à ses fonctions, celle-ci a demandé à son employeur le paiement d'une indemnité de cessation de fonctions, au même titre que celle allouée aux agents employés au moyen de contrat à durée indéterminée lors de la résiliation de leur contrat de travail.. Madame BM a formé un recours devant le tribunal administratif de Madrid contre la décision de refus de son employeur. Or, la réglementation espagnole ne prévoit le versement d'aucune indemnité aux travailleurs employés au moyen de contrats à durée déterminée conclus pour couvrir un poste vacant jusqu'à ce qu'il soit pourvu par la nomination d'un fonctionnaire statutaire. Le tribunal saisit la CJUE d’une question préjudicielle portant notamment sur la compatibilité de la réglementation espagnole avec la clause 4, point 1, de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 qui prévoit l’application du principe de non-discrimination du travailleur à durée déterminée vis-à-vis du travailleur à durée indéterminée.

La CJUE a jugé la réglementation espagnole compatible avec l’accord cadre au motif que « la résiliation d’un contrat de travail à durée indéterminée pour l’une des raisons prévues à l’article 52 du statut des travailleurs, à l’initiative de l’employeur, résulte de la survenance de circonstances qui n’étaient pas prévues à la date de conclusion de ce contrat et qui viennent bouleverser le déroulement normal de la relation d’emploi, l’indemnité prévue à l’article 53, paragraphe 1, sous b), de ce statut visant précisément à compenser ce caractère imprévu de la rupture de cette relation pour une telle raison et, partant, la déception des attentes légitimes que le travailleur pouvait nourrir à cette date en ce qui concerne la stabilité de ladite relation (voir, en ce sens, arrêt du 21 novembre 2018, de Diego Porras, C-619/17, EU:C:2018:936, point 72 et jurisprudence citée). En l’occurrence, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, il ressort du dossier dont la Cour dispose que la relation de travail de Mme BM s’est terminée en raison de la survenance de l’événement prévu à cette fin, à savoir le fait que le poste qu’elle occupait provisoirement était pourvu de manière définitive par la nomination d’un fonctionnaire. Dans ces conditions, la clause 4, point 1, de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui ne prévoit le versement d’aucune indemnité pour cessation de fonctions aux travailleurs à durée déterminée employés en tant qu’agents non titulaires alors qu’elle prévoit le versement d’une telle indemnité aux agents contractuels à durée indéterminée à l’occasion de la résiliation de leur contrat de travail pour un motif objectif. »

 
Notes
puce note Arrêt CJUE du 22 janvier 2020 dans l'affaire C-177/18 (renvoi préjudiciel espagnol)
puce note Accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 annexé à la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999
 
 
La Semaine juridique, n° 21 - 29 mai 2017 "La titularisation des contractuels des collectivités territoriales par la voie de la sélection professionnelle", Conclusions de Denis Perrin, rapporteur public dans l'affaire du TA de Lille, 13 décembre 2016, n° 1601200, pp. 38 à 40.

(La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, a mis en place des procédures de titularisation des contractuels par la voie notamment d’une sélection professionnelle.

Dans ce cadre, il appartient à chaque collectivité de fixer le nombre d’emplois ouverts par grade dans un programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire. Une commission de sélection professionnelle dresse, selon l’article 20 de la loi, la liste des agents aptes à être intégrés en tenant compte des objectifs du programme pluriannuel d'accès à l’emploi titulaire.

Le tribunal a précisé le régime juridique de cette voie d’accès à la fonction publique :

- il a d’abord jugé que la décision de la commission de sélection fixant cette liste est susceptible de recours ;
- il a ensuite considéré que la commission ne pouvait déclarer apte un nombre de candidats supérieurs au nombre de postes ouverts).

La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 374015 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "CDD conduisant, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale de six ans prévue à l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 : pas de requalification en CDI ", pp.40 à 44 
La Semaine juridique, n° 5 - 8 février 2016, conclusions prononcées par Vincent Daumas, rapporteur public dans l'affaire du CE, 30 septembre 2015, n° 375730 (commentée dans Vigie n° 73 - Octobre 2015) "Recrutement sur les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 47 de la loi du 26 janvier 1984 : le recours au CDI est possible", pp. 44 à 47
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