CE, 26 janvier 2018, n° 408215

M. A. candidat au poste d'inspecteur général de la jeunesse et des sports de 2ème classe, a obtenu un avis favorable de la commission de sélection pour figurer sur la liste d'aptitude transmise au ministre chargé de la jeunesse et des sports, malgré trois votes en sa faveur et trois votes en sens inverse.

Par un décret du Président de la République du 10 février 2017, il a été nommé inspecteur général de la jeunesse et des sports de 2ème classe à compter du 11 mars 2017. Il n’a transmis sa déclaration d'intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination que le 8 mars 2017.

L’association professionnelle des membres de l'inspection générale de la jeunesse et des sports a demandé au Conseil d'État l’annulation de cette nomination au motif que celle-ci n’était pas régulière pour deux griefs : d’une part, sur le décompte des votes exprimés par les membres de la commission de sélection, d’autre part, sur la tardiveté de la transmission de la déclaration d’intérêts.

Sur le premier motif, le Conseil d’État a précisé qu’à défaut de dispositions ayant fixé des modalités particulières de décompte des votes exprimés par ses membres, l'avis émis par la commission de sélection des candidats à la nomination dans le grade d'inspecteur général de la jeunesse et des sports de 1re et de 2e classes mentionnée à l'article 7 du décret n° 2002-53 du 10 janvier 2002 portant statut particulier du corps de l'inspection générale de la jeunesse et des sports ne peut être regardé comme favorable à l'inscription d'un candidat sur la liste des candidats proposés au ministre que si le nombre de votes positifs excède d'au moins une unité celui des votes négatifs. Ainsi la liste ayant été irrégulièrement composée, le décret nommant M. A. inspecteur général de la jeunesse et des sports de 2ème classe est entaché d'illégalité.

Sur le second motif, le Conseil d’État rappelle les dispositions introduites par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations de fonctionnaires au I de l'article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Elles disposent que : « la nomination dans l'un des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient, mentionné sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat, est conditionnée à la transmission préalable par le fonctionnaire d'une déclaration exhaustive, exacte et sincère de ses intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination (...) ".

La haute juridiction a indiqué que les personnes occupant des emplois correspondant à l'exercice de fonctions d'inspection générale sont soumises à l’obligation de transmission préalable à la nomination de la déclaration d’intérêts. M. A. n'ayant transmis sa déclaration d'intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination que le 8 mars 2017, soit postérieurement à la signature du décret prononçant sa nomination, celle-ci est donc irrégulière.

Le décret du Président de la République du 10 février 2017 nommant M. A. inspecteur général de la jeunesse et des sports de 2ème classe est donc annulé.
 
Notes
puce note CE, 26 janvier 2018, n° 408215
 
 
Le code des relations entre le public et l’administration (ci-après CRPA) (ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration) a procédé à la codification des règles du retrait et de l'abrogation des actes administratifs unilatéraux. Cette codification intervenue, pour une large part à droit constant, a été également l'occasion de « simplifier les règles de retrait et d’abrogation des actes unilatéraux de l’administration dans un objectif d’harmonisation et de sécurité juridique », ainsi que le prévoyait l'article 3 de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens.
 
Un Titre IV est ainsi consacré à « la sortie de vigueur des actes administratifs » au sein du Livre II relatif aux « actes unilatéraux pris par l’administration » du CRPA. Ces nouvelles règles de sortie de vigueur des actes administratifs  posent un cadre simplifié se substituant aux dispositions textuelles et/ou règles jurisprudentielles jusqu’ici applicables, dont le champ d’application n’était pas identique. Elles ne s’appliquent qu’en l’absence de dispositions spéciales.
 
Ces dispositions sont entrées en vigueur, en ce qu'elles régissent l'abrogation des actes administratifs unilatéraux, le 1er juin 2016.
 
Elles s'appliquent au retrait des actes administratifs unilatéraux qui sont intervenus à compter du 1er juin 2016 (article 9 de l’ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l’administration).

Définition du retrait et de l’abrogation

Aux termes de l’article L. 240-1 du CRPA, l’abrogation d’un acte est « sa disparition juridique pour l’avenir », tandis que le retrait d’un acte est « sa disparition juridique pour l’avenir comme pour le passé ».

Régime du retrait et de l’abrogation

Il convient de distinguer les règles applicables aux décisions créatrices de droits (Chapitre II du Titre IV du Livre II du CRPA) de celles relatives aux actes règlementaires et aux actes non réglementaires non créateurs de droits (Chapitre III du Titre IV du Livre II du CRPA).

 
  • Le retrait des actes réglementaires et des actes non réglementaires non créateurs de droits ne peut intervenir qu’en raison de leur illégalité et ceci, dans un délai maximal de quatre mois à compter de leur édiction (L. 243-3 du CRPA). Cependant, une mesure à caractère de sanction infligée par l’administration peut toujours être retirée (L. 243-4 du CRPA).
 
  • L’abrogation des actes réglementaires et des actes non réglementaires non créateurs de droits  :

- est possible à tout moment, en vertu du principe de mutabilité (L. 243-1 du CRPA), sous réserve le cas échéant de l’édiction de mesures transitoires (L. 221-5 du CRPA : en vertu du principe de sécurité juridique tel que défini par le Conseil d’État dans ses décisions d’assemblée, 24 mars 2006, n° 288460, Société KPMG et de section 13 décembre 2006, n° 287845 Mme Lacroix); 

- devient obligatoire lorsque cet acte est illégal ou dépourvu d’objet, que cette situation existe depuis son édiction ou qu’elle résulte de circonstances de droits ou de faits  intervenus postérieurement à son édiction, (L. 243-2 du CRPA consacrant les jurisprudences du Conseil d’État du  3 février 1989, n° 74052, Compagnie Alitalia, en ce qui concerne les actes réglementaires et du 30 novembre 1990, n° 103889, Association Les Verts, en ce qui concerne les actes non règlementaires non créateurs de droits).

Enfin, un acte administratif unilatéral obtenu par fraude peut être abrogé ou retiré à tout moment (L. 241-2 du CRPA).

A consulter sur le site de la documentation française la 3ème édition du Guide de légistique. Fruit de la collaboration du Conseil d’État et du secrétariat général du Gouvernement, le Guide de légistique s’adresse à tous ceux qui participent à la rédaction des projets de textes normatifs.
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