Ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017

L’article 44 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, (commentée dans Vigie n° 83 - Septembre 2016) habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin :

1° De mettre en œuvre, pour chaque agent public, un compte personnel d’activité ;
2° De renforcer les garanties en matière de formation des agents publics, notamment leurs droits et congés y afférents;
3° De renforcer les garanties applicables aux agents publics en matière de prévention et d’accompagnement de l’inaptitude physique, d’améliorer leurs droits et congés pour raisons de santé ainsi que leur régime des accidents de service et des maladies professionnelles.

En application dudit article 44, l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique met en œuvre, pour les trois versants de la fonction publique :

I Des dispositions relatives à la formation professionnelle et à la création du compte personnel d’activité (CPA) (Titre I) applicables aux fonctionnaires et aux agents contractuels;

II. Des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail (Titre II).

I Formation professionnelle tout au long de la vie et compte personnel d’activité (articles 1 à 7)

Les articles 1er à 4 de la présente ordonnance modifient la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires.

Le droit à la formation professionnelle est redéfini et renforcé à l’article 22 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée. Il doit favoriser le développement professionnel et personnel des agents, faciliter leur parcours professionnel, leur mobilité et leur promotion ainsi que l’accès aux différents niveaux de qualification professionnelle existants. Il doit permettre l’adaptation aux évolutions prévisibles des métiers. Il doit également concourir à l’égalité d’accès aux différents grades et emplois, en particulier entre femmes et hommes, et à la progression des personnes les moins qualifiées.
Tout agent peut bénéficier, à sa demande, d’un accompagnement personnalisé afin de l’aider à élaborer et mettre en œuvre son projet professionnel.

Le compte personnel d’activité (CPA) est créé et mis en œuvre par les articles 22 bis et 22 ter nouveaux de ladite loi.

Le CPA a pour objectif de renforcer l’autonomie et la liberté d’action de son titulaire et de faciliter son évolution professionnelle. Il est constitué d’un compte personnel de formation (CPF) et d’un compte d’engagement citoyen (CEC). Tout agent public peut faire valoir ses droits précédemment acquis au titre du CPA auprès d’un nouvel employeur public ou privé.

Compte personnel de formation (CPF)

Le CPF supprime le droit individuel à la formation (DIF) mais les agents conservent les heures acquises à ce titre et peuvent les utiliser dans le cadre du nouveau dispositif. Le CPF permet aux agents d’accéder à une qualification ou de développer leurs compétences dans le cadre d’un projet d’évolution professionnelle. Il peut être utilisé :
1° En combinaison avec le congé de formation professionnelle ;
2° En complément des congés pour validation des acquis de l’expérience et pour bilan de compétences ;
3° Pour préparer des examens et des concours administratifs, le cas échéant en combinaison avec le compte-épargne temps.
Le CPF est alimenté chaque fin d’année à hauteur de vingt-quatre heures maximum dans la limite de cent vingt heures, au-delà, il est alimenté à hauteur de douze heures jusqu’à un plafond total de cent cinquante heures.
Certains agents peuvent bénéficier d’un CPF renforcé. Les agents de catégorie C sans formation de niveau V peuvent alimenter leur CPF à hauteur de quarante-huit heures maximum par an jusqu’à un plafond de quatre cent heures. Un agent qui cherche à prévenir un risque d’inaptitude à l’exercice de ses fonctions peut bénéficier de ce plafond supplémentaire ainsi que de cent cinquante heures en sus soit un total de cinq cent cinquante heures.
Les frais de formation sont pris en charge par l’employeur.
Pour mobiliser son CPF, l’agent doit obtenir l’accord de son employeur qui doit motiver un éventuel refus, lequel peut être contesté par l’agent devant l’instance paritaire compétente.
Il est à noter qu’une personne qui perd la qualité d’agent public conserve les droits acquis au titre de son CPF auprès de tout nouvel employeur. (Article 5 de l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017)

Compte d’engagement citoyen (CEC)

Le compte d’engagement citoyen a été créé dans le secteur privé par l’article 39 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 qui insère une section qui lui est dédiée dans le code du travail (section 2 du chapitre unique du titre V du livre Ier de la cinquième partie du code du travail). Ces dispositions s’appliquent au secteur public à l’exception du 2° de l’article L. 5151-7 et du L. 5151-12. Il permet à l’agent d’acquérir des heures supplémentaires sur son CPF s’il accomplit une activité citoyenne (article L. 5151-9 du code du travail modifié par l’article 9 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté): service civique, réserve militaire opérationnelle, réserve civile de la police nationale, réserve civique, réserve sanitaire, maître d’apprentissage, bénévolat associatif, volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers. Pour chaque activité citoyenne, l’agent peut acquérir vingt heures supplémentaires dans la limite d’un plafond de soixante heures.

Comme les salariés de droit privé, les agents publics titulaires d’un CEC pourront consulter leurs droits en se connectant au service en ligne gratuit mentionné à l’article L. 5151-6 du code du travail. Ces dispositions seront mises en œuvre au plus tard le 1er janvier 2020.

Afin de prendre en compte la création du CPA, les articles 6 et 7 de l’ordonnance n° 2017-53 modifient pour la fonction publique territoriale:
  • La loi n° 84-594 du 12 juillet modifiée relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
  • L’article 23 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
II. Dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail (articles 8 à 10) applicables aux fonctionnaires en fonction dans les trois versants de la fonction publique

Service à temps partiel pour raison thérapeutique

L’accès au service à temps partiel pour raison thérapeutique est facilité. Désormais, le fonctionnaire concerné peut y avoir accès sans avoir bénéficié au préalable, pour une même affection, d’un arrêt maladie d’une durée de six mois consécutifs. Le comité médical compétent n’est plus consulté si le médecin traitant du fonctionnaire et le médecin agréé rendent un avis favorable concordant.

Création d’une période de préparation au reclassement

Le fonctionnaire reconnu inapte à l’exercice de ses fonctions a désormais droit à une période de préparation au reclassement avec traitement d’une durée maximale d’un an afin de lui permettre d’envisager d’occuper un nouveau poste de travail compatible avec son état physique. Les modalités d’application de ces nouvelles dispositions seront fixées par décret en Conseil d’État.

Régime de prise en charge des incapacités temporaires reconnues imputables au service

L’article 10 de la présente ordonnance, en insérant un article 21 bis dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, article consacré spécifiquement à la prise en charge des incapacités temporaires reconnues imputables au service, clarifie le mode d’octroi du congé avec traitement dans le cas d’une invalidité temporaire imputable au service. Cette incapacité temporaire de travail doit être consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service. Les modalités de ce congé seront déterminées par un décret en Conseil d’État, notamment ses effets sur la situation administrative du fonctionnaire ainsi que les obligations de ce dernier.
Il est à noter que le texte précise qu’est présumé imputable au service, sans que le fonctionnaire ne doive en apporter la preuve comme auparavant :
  • Tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu’en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d’une activité qui en constitue le prolongement normal, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l’accident du service ;
  • Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnées aux articles L. 461-1 et suivantes du code de la sécurité sociale et contractée dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Par ailleurs, les employeurs publics devront désormais fournir les données nécessaires à la connaissance des accidents de service et des maladies professionnelles. Un arrêté du ministre chargé de la fonction publique fixera les modalités pratiques de la collecte et du traitement de ces données.
 
Notes
puce note Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires
puce note Loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 modifiée relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
puce note Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
 
 
La Semaine juridique, n° 21 - 30 mai 2016 - Conclusions prononcées par Édouard Crépey, rapporteur public, dans l'affaire CE, 17 février 2016, n° 371453, CNFPT (commentée dans Vigie n° 78 - Mars 2016) "Concours administratifs et loi du 17 juillet 1978 : une transparence obscurcie?", pp. 20  à 22
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