L’article 72 de la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique prévoit l’instauration d’une procédure de rupture conventionnelle, par laquelle l’administration et un agent public peuvent convenir d’un
commun accord de la cessation définitive des fonctions de ce dernier ou de la fin de son contrat (
Vigie n° spécial-04 – septembre 2019).
Les modalités et conditions de la mise en œuvre de la procédure de rupture conventionnelle sont décrites dans le décret n°2019-1593 du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique.
Le chapitre I du décret porte sur la rupture conventionnelle applicable aux fonctionnaires, qui constitue une procédure expérimentale pour une période de six ans, du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025. La rupture conventionnelle constitue un cas supplémentaire de cessation définitive des fonctions et entraîne la radiation des corps et la perte de la qualité de fonctionnaire. Elle donne droit au versement d’une indemnité spécifique de rupture conventionnelle (ISRC). Elle ne concerne pas les fonctionnaires stagiaires, les fonctionnaires détachés sur contrat, ainsi que les fonctionnaires ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite et justifiant de la durée d’assurance nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum de pension.
Les étapes de la procédure de rupture conventionnelle sont précisées.
D’abord, la procédure de rupture conventionnelle peut être engagée à l’initiative de l’agent ou de l’administration. La partie à l’initiative de la procédure doit informer l’autre partie par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise en main propre contre signature.
Suite à cette demande, au moins un entretien entre les deux parties doit avoir lieu. Il se tient au moins dix jours francs et au plus un mois après réception de la lettre de demande de rupture conventionnelle. Plusieurs entretiens peuvent être organisés. Au cours de ces entretiens, l’agent peut se faire assister par un conseiller, désigné par une organisation syndicale représentative de son choix. Le décret précise les conditions de représentativité des organisations syndicales. En l’absence d’organisation syndicale représentative (dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière), le fonctionnaire peut se faire assister par un conseiller syndical de son choix. Le décret précise également les sujets qui sont obligatoirement abordés au cours de l’entretien : les motifs de la demande et le principe de la rupture conventionnelle, la fixation de la date de la cessation définitive des fonctions, le montant envisagé de l’ISRC, ainsi que les conséquences de la cessation définitive des fonctions, notamment le bénéfice de l’assurance chômage
Les deux parties signent ensuite une convention de rupture, au moins quinze jours francs après le dernier entretien. La convention énonce les termes et les conditions de la rupture conventionnelle et doit fixer le montant de l’ISRC et la date de cessation définitive des fonctions. Un modèle de convention est défini par arrêté du ministre chargé de la fonction publique.
Un jour franc après la signature de la convention, débute un délai de rétractation de quinze jours francs pendant lequel l’une ou l’autre des parties peut exercer son droit de rétractation.
En l’absence de rétractation, le fonctionnaire est radié des cadres à la date de cessation définitive de fonctions convenue dans la convention de rupture et qui intervient, au plus tôt, un jour après la fin du délai de rétractation.
Conformément à l’article 72 de la loi n°2019-828, un fonctionnaire qui, dans les six années suivants une rupture conventionnelle, est recruté à nouveau dans la fonction publique de l’Etat, dans la même collectivité territoriale, le même EPCI ou le même établissement, doit rembourser l’ISRC perçue. Aussi, le décret prévoit que, préalablement à leur recrutement, les candidats retenus pour occuper un emploi en tant qu’agent public doivent adresser à l’autorité de recrutement une attestation sur l’honneur qu’ils n’ont pas bénéficié d’une rupture conventionnelle, selon le cas dans la fonction publique de l’Etat, au sein de la même collectivité territoriale, du même EPCI ou du même établissement, dans les six années précédentes.
Dans les chapitres II à VI du décret, le dispositif de rupture conventionnelle applicable aux agents contractuels des trois versants de la fonction publique recrutés en contrat à durée indéterminée, aux ouvriers de l’Etat et aux personnels médicaux des établissements publics de santé recrutés en contrat à durée indéterminée est précisé. La procédure est similaire à celle applicable aux fonctionnaires et entraîne la fin du contrat ou la rupture de l’acte d’engagement pour les ouvriers d’Etat. Le dispositif de rupture conventionnelle, pour ces agents, est pérenne, contrairement à la rupture conventionnelle applicable aux fonctionnaires, qui est expérimentale.
La rupture conventionnelle n’est pas applicable aux contractuels pendant leur période d’essai, en cas de licenciement ou de démission, aux agents éligibles à une pension de retraite à taux plein et aux fonctionnaires détachés en qualité d’agents contractuels.
Par ailleurs, l’article 72 de la loi n°2019-828 prévoit que la rupture conventionnelle donne lieu au versement de l’ISRC, qui ouvre droit au bénéfice de l’allocation au retour à l’emploi (ARE). Le décret n°2019-1596 du 31 décembre 2019 relatif à l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle dans la fonction publique et portant diverses dispositions relatives aux dispositifs indemnitaires d’accompagnement des agents dans leurs transitions professionnelles précise les modalités d’attribution de l’ISRC. Le montant de l’ISRC est fixé dans la convention. Le législateur a instauré par la loi du 6 août 2019 un montant plancher, et par l’article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 un montant plafond pour encadrer le montant de l’indemnité, et le décret n°2019-1596 en fixe les modalités de calcul.
Ainsi, le montant plancher est progressif selon l’ancienneté de l’agent :
- jusqu’à dix ans (révolus) d’ancienneté, l’ISRC ne peut être inférieure à un quart de mois de rémunération brute par année d’ancienneté.
- de dix à quinze ans d’ancienneté, l’ISRC ne peut être inférieure à deux cinquièmes de mois de rémunération brute par année d’ancienneté
- de quinze à vingt ans d’ancienneté, l’ISRC ne peut être inférieure à un demimois de rémunération brute par année d’ancienneté
- de vingt à vingt-quatre ans d’ancienneté, l’ISRC ne peut être inférieure à trois cinquièmes de mois de rémunération brute par année d’ancienneté
Par ailleurs, concernant le montant plafond, l’ISRC ne peut pas dépasser une somme équivalente à un douzième de la rémunération brute annuelle perçue par l’agent par année d’ancienneté, ici aussi dans la limite de vingt-quatre ans d’ancienneté.
Dans les deux cas, l’ancienneté retenue tient compte des durées de services effectifs accomplis dans les trois versants de la fonction publique. La rémunération brute de référence est la rémunération brute annuelle perçue par l’agent au cours de l’année civile précédant celle de la date d’effet de la rupture conventionnelle. Le décret précise les éléments exclus de la rémunération prise en compte pour le calcul (primes et indemnités qui ont le caractère de remboursement de frais ou liées au changement de résidente par exemple).
Enfin, le décret n°2019-1596 tire les conséquences de l’instauration de l’ISRC pour recentrer le dispositif de l’indemnité de départ volontaire (IDV) sur les restructurations de service dans les versants de l’Etat et territorial de la fonction publique. Ainsi, le décret abroge l’IDV pour création ou reprise d’entreprise dans ces deux versants, ainsi que l’IDV pour projet personnel dans le versant territorial. Les agents pourront néanmoins demander l’attribution de l’IDV pour ces motifs jusqu’au 30 juin 2020, sous réserve que leur démission soit effective avant le 1er janvier 2021.