Publication d’un décret d’application de la loi de programmation et de réforme pour la justice sur la procédure administrative contentieuse

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a pour objectif de moderniser le fonctionnement de la justice en renforçant son accessibilité et sa qualité pour les justiciables, en améliorant le quotidien des professionnels du droit et de la justice et en renforçant l’efficacité de la procédure pénale et de l’exécution des peines. Dans cet objectif, pour la période 2018-2022, le budget du ministère de la justice a été augmenté de 24% et 6 500 emplois ont été créés.

La loi n°2019-222 s’articule autour de six axes : : simplification de la procédure civile, allègement de la charge des juridictions administratives et renforcement de l’efficacité de la justice administrative, simplification et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale, efficacité et sens de la peine, diversification du mode de prise en charge des mineurs délinquants et renforcement de l’efficacité de l’organisation judiciaire, adaptation du fonctionnement des juridictions.

Le décret n° 2019-1502 du 30 décembre 2019 portant application du titre III de la loi n° 2019-222 précise les modalités d’application en matière de procédure administrative contentieuse.

Il précise les modalités de recrutement, le statut, les conditions d’emploi et les attributions des juristes assistants créés par la loi n°2019-222 au sein du Conseil d’Etat et des tribunaux administratifs. Ces agents « apportent leur concours à l'analyse juridique des dossiers nécessitant une expertise particulière qui leur sont confiés » par les membres du Conseil d'Etat ou les magistrats sous la direction desquels ils sont placés. Ils sont recrutés en qualité d'agent contractuel de l'Etat relevant de la catégorie A.

Le décret détaille également les modalités de calcul de la rémunération des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ou d’aide à la décision. Le montant de l’indemnité annuelle qu’ils perçoivent est plafonné à 27 000 euros. Par ailleurs, le décret prévoit une indemnisation de leurs frais de déplacement temporaire.

Le rôle du juge des référés, lorsqu’il est saisi en vue de prévenir une atteinte imminente ou de faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires, est précisé. Ainsi, il est prévu dans le décret que le juge « peut prescrire toute mesure provisoire et conservatoire proportionnée, y compris sous astreinte ».

Le décret fixe la juridiction compétente pour statuer sur une demande d’exécution d’un jugement frappé d’appel ou d’un pourvoi en cassation.

Enfin, il comprend différentes mesures d'ajustement de la procédure contentieuse administrative relatives aux règles de compétence pour connaître des recours dirigés contre les décisions de l'autorité de la concurrence de Nouvelle-Calédonie, aux règles de recevabilité applicables aux recours contre les mesures prises pour l'exécution d'un contrat et aux règles de prise de parole à l'audience devant le TA de Wallis-et-Futuna.

 

 

Il est possible de recourir à un prestataire privé pour participer à la rédaction de l’exposé des motifs et à l’étude d’impact d’un projet de loi

Les députés requérants contestaient le recours par le ministère de la transition écologique et solidaire à un prestataire privé dans la rédaction de l’exposé des motifs et de l’étude d’impact du projet de loi d’orientation des mobilités au motif que ce procédé constituerait « une délégation du pouvoir d'initiative des lois contraire à l'article 39 de la Constitution et à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ».

Le Conseil constitutionnel juge notamment que : « le projet de loi d'orientation des mobilités a été délibéré en conseil des ministres le 26 novembre 2018 et déposé le même jour sur le bureau du Sénat. La circonstance qu'un prestataire privé a participé, sous la direction et le contrôle du Premier ministre, à la rédaction de son exposé des motifs et de son étude d'impact ne méconnaît pas l'article 39 de la Constitution ni aucune autre règle constitutionnelle ou organique. »
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Les dispositions de la loi sur la liberté de presse, qui interdisent de photographier ou d’enregistrer les audiences, sont conformes à la Constitution

L'article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse fait interdiction à quiconque, sous peine d'amende, « d'employer, dès l'ouverture de l'audience des juridictions administratives ou judiciaires, tout appareil photographique ou d'enregistrement sonore ou audiovisuel et de céder ou publier l'enregistrement ou le document obtenu en violation de cette interdiction. ». Un requérant a saisi la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de cette disposition aux droits et libertés que la Constitution garantit en tant que celles-ci méconnaîtraient la liberté d'expression et de communication.

Le Conseil constitutionnel, saisi de cette QPC par la Cour de cassation, juge qu’ « en premier lieu, en instaurant cette interdiction, le législateur a, d'une part, entendu garantir la sérénité des débats vis-à-vis des risques de perturbations liés à l'utilisation de ces appareils. Ce faisant, il a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice. D'autre part, il a également entendu prévenir les atteintes que la diffusion des images ou des enregistrements issus des audiences pourrait porter au droit au respect de la vie privée des parties au procès et des personnes participant aux débats, à la sécurité des acteurs judiciaires et, en matière pénale, à la présomption d'innocence de la personne poursuivie. En deuxième lieu, d'une part, s'il est possible d'utiliser des dispositifs de captation et d'enregistrement qui ne perturbent pas en eux-mêmes le déroulement des débats, l'interdiction de les employer au cours des audiences permet de prévenir la diffusion des images ou des enregistrements, susceptible quant à elle de perturber ces débats. D'autre part, l'évolution des moyens de communication est susceptible de conférer à cette diffusion un retentissement important qui amplifie le risque qu'il soit porté atteinte aux intérêts précités. En dernier lieu, l'interdiction résultant des dispositions contestées, à laquelle il a pu être fait exception, ne prive pas le public qui assiste aux audiences, en particulier les journalistes, de la possibilité de rendre compte des débats par tout autre moyen, y compris pendant leur déroulement, sous réserve du pouvoir de police du président de la formation de jugement. »

Il en déduit que l'atteinte à l'exercice de la liberté d'expression et de communication qui résulte des dispositions contestées est nécessaire, adaptée et proportionnée aux objectifs poursuivis.
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Pour la première fois, le Conseil d’Etat juge qu’une personne peut obtenir réparation des préjudices qu’elle a subis du fait de l’application d’une loi déclarée contraire à la Constitution

Le premier alinéa de l’article 7 de l’ordonnance du 21 octobre 1986 relative à l’intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l’entreprise et à l’actionnariat des salariés soumet toute entreprise à l’obligation de garantir à ses salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise. Les modalités de mise en œuvre de cette mesure devaient être précisées par un décret en Conseil d’Etat. Or, cette dernière disposition a été déclarée contraire à la Constitution par une décision du Conseil constitutionnel (Cons. const., QPC, 1er août 2013, n° 2013-336) en ce que le législateur avait méconnu l’étendue de sa compétence.

Le Conseil d’Etat a été saisi de demandes indemnitaires dans le cadre de trois recours contentieux formés d’une part par des sociétés (Req. n° 425981 et 425983) et, d’autre part, par un particulier (Req. n° 428162) sur le fondement du premier alinéa de l’article 7 de l’ordonnance précitée. Les requérants faisaient valoir, dans les deux premières requêtes que c’est à tort qu’ils avaient dû verser une participation à leurs salariés, et dans la troisième requête, qu’il n’en avait pas perçu.

Le Conseil d’Etat commence par rappeler le principe ancien selon lequel la responsabilité de l’Etat du fait des lois est susceptible d’être engagée « sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de l’adoption d’une loi à la condition que cette loi n’ait pas exclu toute indemnisation et que le préjudice dont il est demandé réparation, revêtant un caractère grave et spécial, ne puisse, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés. » Il juge cependant qu’ « elle peut également être engagée, d’autre part, en raison des exigences inhérentes à la hiérarchie des normes, pour réparer l’ensemble des préjudices qui résultent de l’application d’une loi méconnaissant la Constitution ou les engagements internationaux de la France. Toutefois, il résulte des dispositions des articles 61, 61-1 et 62 de la Constitution que la responsabilité de l’Etat n’est susceptible d’être engagée du fait d’une disposition législative contraire à la Constitution que si le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1, lors de l’examen d’une question prioritaire de constitutionnalité, ou bien encore, sur le fondement de l’article 61, à l’occasion de l’examen de dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine. En outre, l’engagement de cette responsabilité est subordonné à la condition que la décision du Conseil constitutionnel, qui détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause, ne s’y oppose pas, soit qu’elle l’exclue expressément, soit qu’elle laisse subsister tout ou partie des effets pécuniaires produits par la loi qu’une action indemnitaire équivaudrait à remettre en cause. »

En l’espèce, aucun lien de causalité entre l’inconstitutionnalité de la loi et les préjudices des requérants n’a été établi. En l’absence d’engagement de la responsabilité de l’État du fait de la loi, les recours ont été rejetés.
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Premières assises nationales de la médiation administrative

Le Conseil d’Etat a organisé, le mercredi 18 décembre 2019, les premières assises nationales de la médiation administrative. Une trentaine d’intervenants ont débattu, autour de sept tables rondes, de la médiation conventionnelle et de la médiation institutionnelle. L’une de ces tables rondes portait plus spécifiquement sur la médiation dans la fonction publique. Les vidéos de cet événement ont été publiées sur le site du Conseil d’Etat.

L’organisation de ces assises témoigne de l’intérêt porté aujourd’hui à la médiation dans le règlement des litiges administratifs. Cette question est d’autant plus d’actualité que la loi n°2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a prévu, dans son article 81, la possibilité pour les communes, départements, régions et EPCI à fiscalité propre d’instituer un médiateur territorial.
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La QPC fête son dixième anniversaire

La question prioritaire de constitutionnalité (QPC) permet à tout justiciable de contester la constitutionnalité d’une disposition législative à l’occasion d’un procès devant une juridiction administrative ou judiciaire lorsque celui-ci estime qu’un texte porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Elle a été instaurée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, et instituée par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel rend environ soixante-quinze décisions QPC par an.

A l’occasion du dixième anniversaire de la QPC en 2020, le Conseil constitutionnel lance l’événement « QPC 2020 », à travers lequel il soutient la réalisation d’une série de travaux de recherche sur la QPC. L’objectif est de dresser un bilan d’étape de cette modalité de contrôle de constitutionnalité a posteriori et d’éclairer certains aspects encore insuffisamment documentés. Deux orientations ont été retenues : mieux connaître les aspects sociologiques de la QPC, et procéder à des bilans jurisprudentiels thématiques dans les principaux domaines juridiques concernés par les décisions QPC.

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