L’employeur peut mettre fin aux CDD de professeurs qu'il a recrutés pour une année scolaire, moyennant le versement d'une indemnité financière

Le litige porte sur la résiliation des contrats de travail à durée déterminée de professeurs espagnols non titulaires, recrutés pour des motifs de nécessité et d’urgence afin d’exercer à titre temporaire des fonctions dévolues aux fonctionnaires.

La question préjudicielle porte sur l’interprétation de la clause 4 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 (« accord-cadre »), qui figure à l’annexe de la directive 1999/70/CEE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée. La juridiction de renvoi demande si cette clause s’oppose à une réglementation nationale permettant la résiliation du contrat de travail des professeurs non titulaires recrutés jusqu'au terme de l'année scolaire, au motif que les conditions de nécessité et d’urgence auxquelles était subordonné leur recrutement ne sont plus remplies à cette date, alors même que la relation de travail des professeurs fonctionnaires s'est poursuivie, notamment pendant les congés annuels d’été.

En vertu de la nature de leur contrat, les agents contractuels ne bénéficient pas de congés payés annuels sous forme de jours effectifs de repos.

La Cour estime que si les professeurs titulaires et les agents contractuels exercent les mêmes fonctions, eu égard à la nature de leur travail et aux conditions de formation et de travail, la différence de traitement résulte de la nature de la relation de travail des agents non titulaires recrutés à durée déterminée. Dans la présente affaire, le contrat de travail prend fin au terme de l’année scolaire, au moment où ces agents n'exercent plus leurs fonctions. Dès lors, l’Etat membre peut mettre fin légalement au contrat de travail de ses agents à la fin de l’année scolaire, alors même que les professeurs qui ont la qualité de fonctionnaires ont une relation de travail non interrompue.

Il en résulte une absence de différence de traitement entre les deux catégories d'agents, sous réserve que lesdits professeurs perçoivent une indemnité financière à ce titre.
 

Sous certaines conditions, la CJUE valide l’absence d’indemnité à l’échéance de CDD conclus pour remplacer un travailleur permanent

A la suite de la décision C-331/17 du 25 octobre 2018 (Vigie n° 107, novembre 2018), la Cour considère que les clauses 4 et 5 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, annexé à la directive 1999/70/CEE du Conseil sur le travail à durée déterminée, n’oblige pas les Etats membres à prévoir une indemnité au bénéfice des travailleurs employés par contrats à durée déterminée pour remplacer le titulaire d’un emploi permanent. Il doit néanmoins exister dans l’ordre juridique national une mesure efficace pour éviter et sanctionner les abus à l’égard des travailleurs qui n'ont droit à aucune indemnité après la rupture de leur CDD. Ainsi, il incombe aux autorités nationales d’adopter des mesures pour garantir l’effet utile de l’accord-cadre.
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La limitation de la durée de la période d’essai et de son renouvellement ne peut s’appliquer qu’à compter de la date d’entrée en vigueur du texte les instituant

Mme B…A… a été recrutée le 15 avril 2014 par l’Autorité de la concurrence en qualité d’agent contractuel par un contrat à durée indéterminée. Sa période d’essai, initialement fixée à 26 semaines, a été renouvelée par avenant le 23 septembre 2014 pour la même durée. L’intéressée a finalement été licenciée le 10 mars 2015, avant l’expiration de sa période d’essai renouvelée. Son recours gracieux a fait l’objet d’une décision de rejet, qu’elle conteste auprès du tribunal administratif de Paris. Ce dernier a annulé la décision de licenciement ainsi que le rejet du recours gracieux de la requérante. La Cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt du 20 juin 2017, a rejeté l'appel formé contre ce jugement par l'Autorité de la concurrence. Celle-ci a saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation dirigé contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris.

Le Conseil d’Etat rappelle dans un premier temps que l'article 9 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat ne limite la durée initiale de la période d’essai, ainsi que la durée de son renouvellement, que depuis l’adoption de l’article 3 du décret du 3 novembre 2014. Antérieurement, aucune limite à la durée de la période d’essai n’était prévue pour les agents contractuels. Or, cette disposition est intervenue postérieurement au renouvellement de la période d’essai de la requérante et ne fait l’objet d’aucune règle particulière d’entrée en vigueur.

Le Conseil d’Etat pose le principe selon lequel les modifications apportées aux règles qui régissent les agents contractuels leur sont, sauf dispositions contraires, immédiatement applicables. Cette applicabilité immédiate aux contrats en cours n’emporte toutefois pas effet rétroactif. Aussi, la limitation de la durée de la période d’essai et de son renouvellement ne peut s’appliquer qu’à compter de la date d’entrée en vigueur du texte les instituant, en l’espèce le décret du 3 novembre 2014, soit le 6 novembre 2014.

Le Conseil d’Etat opère une substitution de motifs de l’arrêt attaqué. La Cour administrative d’appel a en effet commis une erreur de droit en estimant que la limitation de la durée de la période d’essai fixée à 4 mois par le décret du 17 janvier 1986 modifié pouvait être applicable à compter de la date du recrutement de la requérante, ce qui revenait à conférer à ladite disposition un effet rétroactif. Le juge estime que la limitation de durée de la seconde période d’essai de l’intéressée, résultant de l’adoption du décret du 3 novembre 2014, devait débuter à compter de l’entrée en vigueur de ce dernier. Dès lors, la période d’essai aurait dû prendre fin « au plus tard au terme d'un délai de quatre mois à compter de cette date ».

Le pourvoi formé par l’Autorité de la concurrence est donc rejeté.
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