Décret n° 2015-1145 du 15 septembre 2015

La partie règlementaire du code de justice administrative (CJA) a été modifiée par le décret n° 2015-1145 du 15 septembre 2015, entré en vigueur le 18 septembre 2015 pour la plupart de ces dispositions.

Les principaux points suivants sont concernés en matière de procédure contentieuse :
  • en cas de connexité entre une requête relevant d'un tribunal administratif et une autre de la compétence de premier ressort d'une cour administrative d'appel, cette dernière est désormais compétente lorsque le tribunal est saisi de conclusions connexes à des conclusions présentées devant la cour administrative d'appel ; si le tribunal est saisi de conclusions distinctes mais connexes relevant, pour certaines de sa compétence, pour d'autres de la compétence en premier et dernier ressort d'une cour administrative d'appel, son président doit renvoyer l'ensemble des conclusions à la cour ;
  • le délai de recours contre une décision avant dire droit est prorogé jusqu'à l'expiration du délai de pourvoi en cassation contre la décision qui règle définitivement le fond du litige ;
  • les demandes portant sur les modalités d'exécution des décisions de justice rendues par les tribunaux et cours administratives d'appel sont adressées à ces juridictions et non plus au Conseil d'État qui ne statue que sur l'exécution de ses propres décisions ou de celles des juridictions administratives spéciales. Toutefois, un président de juridiction peut, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, renvoyer la demande d'éclaircissement au Conseil d'État ;
  • les tribunaux administratifs d'outre mer portent la dénomination de la collectivité relevant de leur ressort (tribunaux administratifs de Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Réunion et de Wallis-et-Futuna)
  • enfin, la généralisation de l'application informatique Télérecours en outre-mer est reportée d'une année jusqu'au 31 décembre 2016 par une modification de l'article 6 du décret n° 2012-1437 du 21 décembre 2012 relatif à la communication électronique devant le Conseil d'État, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs.
 

CEDH, 15 septembre 2015, Tsanova - Gecheva c / Bulgarie, n°43800/12

Mme Tsanova-Gecheva occupait depuis juillet 2009, le poste de vice-président du tribunal de la ville de Sofia. Le poste de président étant devenu vacant, elle fut désignée pour exercer les fonctions de présidente du tribunal par interim. Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) fit paraître le mois suivant un avis de concours afin de pourvoir le poste vacant. A l'issue d'une évaluation des candidatures par le CSM, Mme Tsanova-Gecheva et Mme Y reçurent à égalité la mention d'appréciation la plus haute. Le CSM procéda à un vote à bulletin secret à l'issue duquel Mme Y fut nommée au poste de président de tribunal.   
 
La candidature et la nomination de Mme Y firent l'objet d'une large couverture médiatique ainsi que de critiques virulentes de la part des médias bulgares et de personnalités publiques, Mme Y ayant été présentée comme une amie proche du ministre de l'Intérieur en exercice. Deux juges démissionnèrent en tant que membres du CSM et dénoncèrent publiquement une procédure de nomination non-démocratique au résultat prédéterminé. 

Après avoir épuisé les recours internes contre cette nomination, Mme Tsanova-Gecheva  a saisi la Cour européenne des droits de l'Homme en invoquant la violation de l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme relatif au droit à un procès équitable. La Cour rappelle qu'elle n'a pas à vérifier si la décision attaquée est régulière et justifiée, elle doit uniquement déterminer si la requérante a eu accès à un tribunal de pleine juridiction, caractérisant une procédure judiciaire équitable. En l'espèce, la juridiction nationale a pu examiner l'ensemble des questions de fait et de droit, contrôler si le choix n'avait pas été effectué en détournement de pouvoir et vérifier les conditions légales de la procédure. La Cour conclut à la non-violation de l'article 6§1, bien que se disant préoccupée par les allégations de la requérante concernant l’absence de transparence et l’ingérence du pouvoir politique dans la procédure de nomination en cause.

La Cour a indiqué qu’il ne lui appartenait pas, dans le cadre de la présente requête qui concernait le caractère équitable de la procédure judiciaire sur le recours d’une candidate non retenue par le CSM, de se prononcer sur l’opportunité du choix effectué par cet organisme ou sur les critères qui auraient dû être pris en compte.
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CEDH, 17 septembre 2015, Renard et autres c/ France, n° 3569/12

Dans ces affaires, les requérants ont saisi la Cour européenne des droits de l'Homme, afin de censurer le refus par la Cour de cassation de renvoyer au Conseil constitutionnel des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) comme incompatible avec le droit d'accès à un tribunal protégé par l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme. La Cour a rejeté ces requêtes pour irrecevabilité.

Elle précise que l'article 6, invoqué par les requérants, "ne garantit pas en tant que tel le droit d'accès à un tribunal pour contester la constitutionnalité d'une disposition légale, notamment lorsque le droit national prévoit que le contrôle de constitutionnalité n'est pas déclenché directement par un requérant, mais par un renvoi effectué par la juridiction devant laquelle l'inconstitutionnalité alléguée est soulevée". En revanche si le refus d'un juge interne de poser une question préjudicielle est arbitraire, alors cela est de nature à affecter l'équité de la procédure en cause. Or en l'espèce, la Cour constate que la Cour de cassation a motivé son refus de renvoi des QPC posées au regard des critères posés par le droit interne français, c'est à dire l'absence de nouveauté et de caractère sérieux.

Dès lors "aucune apparence d'arbitraire de nature à affecter l'équité des procédures en cause" n'était à relever. En conséquence, en l'absence d'atteinte injustifiée au droit d'accès au Conseil constitutionnel, les requêtes ont été rejetées.
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CCass, ch. Soc, 22 septembre 2015, n° 13-26.032

Une association assurant des activités de foyer rural, d'accueil et de loisirs sans hébergement employait une responsable administrative, lienciée pour motif économique suite à une réduction de la subvention municipale allouée à cette association. Quelques mois après son licenciement, la commune décide, par délibération du conseil municipal, de reprendre l'activité du centre de loisirs.

La Cour de cassation fait, à l'occasion de ce contentieux, application du principe de séparation des pouvoirs.

Les juges du fond ont pu retenir que le licenciement économique prononcé à l'occasion du transfert de l'entité économique dont relève la salariée était dépourvu d'effet au regard de la reprise immédiate par la commune de la même activité sur les mêmes lieux, selon les dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail. La question du maintien du contrat de travail dans le cadre de la reprise d'activité amène la Cour de cassation à préciser que le juge judiciaire ne peut pas faire injonction à la personne publique de proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles du contrat de droit privé initial. Lorsqu'un salarié se prévaut de la poursuite de son emploi au service de la personne de droit public, le juge judiciaire, après avoir constaté la réunion des conditions requises, doit renvoyer le salarié à mieux se pourvoir afin que soit faite injonction à la personne publique de faire les offres de contrat auxquelles elle est tenue.

L'arrêt de la cour d'appel de Versailles, rendu le 12 septembre 2013, est donc partiellement annulé en ce qu'il a condamné sous astreinte la commune à réintégrer la salariée et à lui proposer un contrat de travail de droit public. La Cour de Cassation renvoie les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.
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La Semaine juridique, n° 36 - 7 septembre 2015 "L'office du juge administratif renforcé sous l'influence du droit européen", par Fabien Tesson, pp. 25 à 30

La Semaine juridique, n° 36 - 7 septembre 2015 "L'office du juge administratif renforcé sous l'influence du droit européen", par Fabien Tesson, pp. 25 à 30
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AJDA, n° 29 / 2015 - 14 septembre 2015 "Télérecours, l'application qui bouscule les habitudes", par Jean-Marc Pastor et Diane Poupeau, pp. 1612 à 1614

AJDA, n° 29 / 2015 - 14 septembre 2015 "Télérecours, l'application qui bouscule les habitudes", par Jean-Marc Pastor et Diane Poupeau, pp. 1612 à 1614
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AJDA, n° 29 / 2015 - 14 septembre 2015 "Réserves d'interprétation transitoires dans la jurisprudence QPC", par Maxime Charité, pp. 1622 à 1625

AJDA, n° 29 / 2015 - 14 septembre 2015 "Réserves d'interprétation transitoires dans la jurisprudence QPC", par Maxime Charité, pp. 1622 à 1625
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