CE, 21 février 2018, n° 396013

Mme B., ingénieure territoriale au sein des services de la région Île-de-France, a été placée en congé de maladie ordinaire à plein traitement à compter du 17 août 2011. Puis, par six arrêtés successifs, elle a été mise en congé de maladie à demi-traitement du 6 octobre 2011 au 15 mai 2012. Dans l’intervalle, elle a demandé sans succès à son employeur, le 2 décembre 2011, à être replacée en congé à plein traitement au motif que l'affection dont elle souffrait serait imputable au service. Elle a été convoquée le 29 février 2012 par le médecin de prévention à un rendez-vous, auquel elle a refusé de se rendre. La commission de réforme, dont la consultation est obligatoire dans ces circonstances, a estimé dans un avis du 22 mai 2012 ne pas être en mesure de se prononcer sur le cas de Mme B., faute " d'élément suffisant ".

Ella a saisi, en vain, le tribunal administratif de Paris, puis la cour administrative d'appel de Paris, d’une demande d’annulation des six arrêtés litigieux.

Mme B. s'est pourvue en cassation.

Le Conseil d'État a précisé que la commission de réforme étant obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice du 2e alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifié portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, l'administration dispose, à compter de la date de cette demande d'un délai de deux mois pour se prononcer .

Lorsque la commission met en œuvre une mesure d'instruction, ce délai est porté à trois mois. Tant que l'un ou l'autre de ces délais n'est pas arrivé à son terme, le Conseil d’Etat estime que « l'administration n'est pas tenue d'accorder au fonctionnaire le bénéfice de l'avantage qu'il demande. En revanche, l'avis de la commission de réforme contribuant à la garantie que la décision prise le sera de façon éclairée, quand bien même cet avis n'est que consultatif, en l'absence d'avis de la commission (…), l'administration doit, à l'expiration de l'un ou l'autre, selon le cas, de ces délais, placer, à titre conservatoire, le fonctionnaire en position de congé maladie à plein traitement, sauf si elle établit qu'elle se trouvait, pour des raisons indépendantes de sa volonté, dans l'impossibilité de recueillir l'avis de la commission de réforme ».
Par conséquent, le Conseil d’État considère que les arrêtés plaçant Mme B. en congé de maladie à demi-traitement entre le 2 février (soit 2 mois après sa demande) et le 22 mai (date de l'avis de la commission de réforme) sont illégaux. L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris et le jugement du tribunal administratif sont annulés.
 

CE, 20 février 2018, n° 401731

M. B., directeur territorial d’une communauté de communes de la région Nouvelle-Aquitaine, avait été placé en 2008, en disponibilité pour la durée de son mandat local de conseiller municipal, conseiller communautaire et président de ladite communauté.

Après la démission de son mandat de président de la communauté en 2011, il a demandé sa réintégration au sein de cette communauté de communes. Le nouveau président a rejeté sa demande au motif que l'intérêt du service, en particulier l'organisation des équipes de direction et d'encadrement, ne permettait pas de procéder à cette réintégration.

La cour administrative d'appel de Bordeaux, confirmant le jugement du tribunal administratif, a rejeté son recours contre cette décision au motif que la demande avait été formulée avant le terme prévu par l'arrêté de mise en disponibilité et que M. B. conservait son mandat de conseiller municipal.

M. B. s’est pourvu en cassation.

La haute juridiction considère qu'en vertu « des dispositions combinées des articles L. 2123-9 et L. 5214-8 du code général des collectivités territoriales, les maires, les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins et les membres du conseil d'une communauté de communes qui, pour l'exercice de leur mandat, ont cessé d'exercer leur activité professionnelle de fonctionnaires territoriaux, peuvent bénéficier des dispositions des articles L. 3142-83 à L. 3142-87 du code du travail, en l'absence d'autres dispositions qui leur seraient plus favorables ».
Aux termes de ces articles du code du travail, un salarié élu à un mandat parlementaire ou local peut retrouver son précédent emploi ou un emploi analogue assorti d'une rémunération équivalente, dans les deux mois suivant la date à laquelle il a avisé son employeur de son intention de reprendre cet emploi.

Le Conseil d’État précise que la circonstance « que la période d'exercice effectif du mandat diffère de sa durée théorique ou de celle, qu'éventuellement, le fonctionnaire ou l'administration ont pu déterminer à l'occasion de la demande de suspension de l'activité professionnelle, notamment dans les cas où la cessation du mandat résulte de la démission de son titulaire, est sans incidence sur le droit du fonctionnaire à retrouver son précédent emploi dans les conditions désormais prévues à l'article L. 3142-84 du code du travail. En outre, lorsque le bénéficiaire de la suspension d'activité professionnelle exerce plusieurs mandats lui ouvrant droit à une telle suspension, la cessation d'un seul de ces mandats permet au fonctionnaire de retrouver son précédent emploi dans les conditions désormais prévues à l'article L. 3142-84 du code du travail ».

L'arrêt de la cour administrative d'appel est annulé pour erreur de droit.
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AJDA n° 04 / 2018 - 5 février 2018, " Le détachement sur un statut d'emploi n'ouvre pas droit au reclassement", conclusions de François-Xavier Bréchot, rapporteur public dans l'affaire de la CAA de Nantes, 24 novembre 2017, n° 16NT02712, pp. 226 à 229

AJDA n° 04 / 2018 - 5 février 2018, " Le détachement sur un statut d'emploi n'ouvre pas droit au reclassement", conclusions de François-Xavier Bréchot, rapporteur public dans l'affaire de la CAA de Nantes, 24 novembre 2017, n° 16NT02712, pp. 226 à 229
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Décrets n° 2018-141 et n° 2018-135 du 27 février 2018

Fonction publique de l’État

L’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, modifié par l’article 11 de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (Vigie n° 96 - Novembre 2017), renforce la nature et la portée des enquêtes administratives diligentées à l’encontre de certains agents occupant un emploi participant à l’exercice de missions de souveraineté de l’État ou relevant du domaine de la sécurité ou de la défense.

Selon le résultat de l’enquête administrative, après une procédure contradictoire, l’agent peut être réaffecté dans un autre emploi ou muté. Si ces mesures ne peuvent être mises en œuvre, le fonctionnaire peut être radié des cadres et l’agent contractuel peut être licencié. Conformément au deuxième alinéa du paragraphe IV de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, « A l’exception du changement d’affectation, cette procédure inclut l’avis d’un organisme paritaire dont la composition et le fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d’État ».

Sur ce fondement, le décret n° 2018-141 du 27 février 2018 portant application de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure met en place une commission paritaire compétente pour la fonction publique de l’État qui sera consultée sur toute mesure de radiation ou de mutation d’un fonctionnaire ainsi que sur toute mesure de licenciement d’un agent contractuel ne pouvant être maintenu dans ses fonctions.

Le décret du 27 février 2018 crée au chapitre IV du titre Ier du livre Ier (partie réglementaire) du code de la sécurité intérieure une section 2 intitulée « Conséquences des enquêtes administratives en application du IV de l’article L. 114-1 » comprenant les articles R. 114-6-1 à R. 114-6-6. Ces articles précisent la composition, le fonctionnement et les compétences de cette nouvelle commission paritaire présidée par un conseiller d’État, comprenant un nombre égal de représentant du personnel et de représentants de l’administration. Ces derniers comprennent des agents désignés par arrêté du Premier ministre sur proposition du ministre de l’intérieur, du ministre de la justice, du ministre des affaires étrangères, du ministre de la défense et des ministres chargés du budget et de la fonction publique. La commission délibère à huis clos. Elle se prononce dans le délai d’un mois à compter du jour où elle a été convoquée. Elle adopte alors un avis motivé, à la majorité des membres présents.

Compte tenu de ce nouveau dispositif, le décret du 27 février 2018 modifie en cohérence, le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 modifié relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.

Le décret du 27 février 2018 prévoit également que les personnes faisant l’objet d’une enquête administrative sont informées de ce que cette enquête donne lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles, à l’exception des fichiers d’identification. Ces dispositions sont insérées à l’article R.114-6 du code de la sécurité intérieure.

Corps militaires

Il est à noter que le décret n° 2018-135 du 27 février 2018 portant application de l’article L. 4139-15-1 du code de la défense met en œuvre, pour tous les corps militaires, un dispositif similaire à celui mis en place pour la fonction publique de l’État. A l’issue d’une enquête administrative réalisée dans le cadre de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, sur le fondement de l’article L. 4139-15-1 du code de la défense, un conseil émet un avis sur la radiation des cadres d’un militaire ou la résiliation de son contrat.

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