Décrets n° 2017-1470 et n° 2017-1471 du 12 octobre 2017
Les décrets n° 2017-1470 du 12 octobre 2017 relatif à l’accès aux corps et cadres d’emplois de la catégorie C de la fonction publique par la voie du parcours d’accès aux carrières de la fonction publique de l’État, territoriale et hospitalière et n° 2017-1471 du 12 octobre 2017 instituant à titre expérimental un dispositif d’accompagnement des agents publics recrutés sur contrat à durée déterminée et suivant en alternance une préparation aux concours de catégorie A ou B de la fonction publique mettent en œuvre des dispositions introduites par les articles 162 et 167 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté (Vigie n° 88 - février 2017) afin de diversifier les modes d’accès à la fonction publique. Ils concernent les trois versants de la fonction publique.
Le dispositif PACTE
L’article 162 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté en modifiant l’article 22 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée, l’article 38 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée, l’article 32-2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée, a renforcé le dispositif d’accès à la fonction publique par la formation en alternance.
Le dispositif PACTE a pour objet de permettre à des personnes peu qualifiées ou sans qualification d’être recrutées par contrat dans la fonction publique dans des emplois du niveau de la catégorie C puis, après formation, d’être titularisées sous réserve de l’obtention du titre ou du diplôme requis ainsi que de la vérification de leur aptitude. La durée du contrat ne peut être inférieure à douze mois ni supérieure à deux ans.
Le décret n° 2017-1470 du 12 octobre 2017 précité , qui entre en vigueur le 15 octobre 2017, met en œuvre sur le plan réglementaire les nouvelles dispositions apportées par l’article 162 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 :
Élargissement de l’accès au contrat PACTE et encadrement du nombre de postes offerts
Le contrat est élargi :
1° Aux jeunes de seize à vingt-huit ans, au lieu de seize à vingt-cinq ans ;
2° Aux demandeurs d’emploi de longue durée, âgés de quarante-cinq et plus et bénéficiaires :
- du revenu de solidarité active, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation aux adultes handicapés ;
- ou du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation de parent isolé lorsque la personne réside dans les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon .
Dans les trois versants de la fonction publique, le nombre de postes offerts annuellement au titre du dispositif PACTE ne peut être inférieur à 20% du nombre total de postes à pourvoir à la fois par cette voie et par la voie du recrutement sans concours. Dans la fonction publique territoriale, ce pourcentage s’applique dans les régions, les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 40 000 habitants ainsi que dans les établissements publics assimilés. Le présent décret précise que la période à prendre en compte pour la détermination de cette limite de 20% est l’année civile correspondant à l’année au titre de laquelle le recrutement sans concours est ouvert (articles 3, 18 et 30).
Désignation d’un tuteur
Un tuteur est désormais expressément désigné pour accueillir et guider l’intéressé dans son administration d’emploi, lui apporter tout conseil utile pour son activité dans le service et suivre son parcours de formation. Pour cela, le tuteur bénéficie d’une formation spécifique ainsi que de la disponibilité nécessaire pour l’accomplissement de sa mission. Le présent décret limite le nombre de personnes qu’un tuteur peut encadrer (articles 8, 22 et 34).
Un bilan des recrutements intervenus par ce dispositif doit désormais être présenté annuellement devant le comité technique compétent. Ce bilan devra notamment mentionner le nombre d’agents chargés du tutorat ainsi que les modalités de prise en compte du tutorat tant dans l’organisation du travail de l’agent concerné que du collectif de travail (articles 15, 27 et 41).
Rapprochement des dispositions applicables aux bénéficiaires du dispositif PACTE avec celles applicables aux agents contractuels des trois versants de la fonction publique
Comme un agent contractuel, un agent bénéficiaire du dispositif PACTE peut désormais solliciter pour raisons de famille l’octroi d’un congé sans rémunération dans la limite de quinze jours par an. (Articles 5, 20 et 32)
Cet agent bénéficie également d’une grande partie des dispositions réglementaires applicables aux agents contractuels des trois versants de la fonction publique qui figurent dans les trois décrets suivants :
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 modifié relatif aux dispostions générales applicables aux agents contractuels de l'État pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État (article 4);
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispostions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale (article 19);
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 modifié relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière (article 31).
Ces dispositions concernent notamment les modalités de recrutement, les différents congés, les absences, les conditions d’ouverture des droits soumis à condition d’ancienneté, la suspension et la discipline, la fin de contrat, le licenciement et les indemnités afférentes.
Il est à noter que les recrutements ouverts par ce dispositif, au titre des années 2017 et 2018 avant l’entrée en vigueur du décret, se poursuivent jusqu’à leur terme, conformément aux règles précédemment définies pour leur organisation (article 42).
Le dispositif PRAB
Afin de diversifier les recrutements opérés dans les trois versants de la fonction publique, l’article 167 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté met en place un dispositif expérimental pour une durée de six ans afin de recruter par contrat à durée déterminée des personnes sans emploi âgées au plus de vingt-huit ans dans des emplois du niveau de la catégorie A ou B. Ce dispositif est dénommé PRAB (PRéparation aux concours de catégorie A ou B). L’accès à ces emplois s’effectue dans le cadre d’une formation en alternance pour que ces personnes se préparent aux concours d’accès à un corps ou à un cadre d’emplois correspondant à l’emploi occupé. Tout comme le dispositif PACTE, la durée du contrat PRAB ne peut être inférieure à douze mois ni supérieure à deux ans, renouvelable dans la limite d’un an en cas d’échec au concours.
L’article 167 de la loi du 27 janvier 2017 prévoit que le recrutement de ces personnes s’effectue à l’issue d’une sélection opérée sur la base de leurs aptitudes et de leur motivation évaluées par une commission qui, à aptitudes égales, accorde la priorité aux candidats résidant :
- dans un quartier prioritaire de la ville ;
- dans une zone de revitalisation rurale ;
- en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou Saint-Pierre-et-Miquelon ;
- dans un territoire défini par décret en Conseil d’Etat dans lequel les jeunes rencontrent des difficultés particulières d’accès à l’emploi.
Cette procédure de recrutement peut également être proposée à des personnes en situation de chômage de longue durée, âgées de quarante-cinq ans et plus, bénéficiaires :
- du revenu de solidarité active, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation aux adultes handicapés;
- ou du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation de parent isolé lorsque la personne réside en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le décret n° 2017-1471 du 12 octobre 2017, qui entre en vigueur le 1er janvier 2018, précise les modalités de mise en œuvre de ce dispositif expérimental.
Il définit notamment les territoires dans lesquels les jeunes rencontrent des difficultés particulières d’accès à l’emploi : il s’agit des zones d’emploi dans lesquelles le taux de chômage moyen annuel est supérieur au taux de chômage moyen annuel national au 31 décembre de l’année précédant le recrutement. La liste de ces territoires est publiée sur le service de communication en ligne du ministère chargé de la fonction publique (article 3).
Enfin le décret précise les dispositions réglementaires qui s’appliquent à ce type de contrat de droit public (chapitre 1er) ainsi que :
1° Les modalités de sélection et de recrutement (chapitre II)
Dans le cadre de ce dispositif, les recrutements font l’objet d’une publicité préalable sur les sites internet des autorités organisatrices des opérations de sélection, sur le service de communication en ligne du ministère chargé de la fonction publique ainsi que dans les agences locales de Pôle emploi (article 4).
Sont définis :
- la composition du dossier de candidature (article 5);
- la composition et le fonctionnement des commissions de sélection. Le président et les membres de cette commission sont nommés par l'autorité qui dispose du pouvoir de recruter ou, pour la fonction publique territoriale, soit par les centres de gestion, soit par les collectivités et établissements non affiliés à un centre de gestion (article 6).
Le contenu et le modèle du contrat proposé à la personne concernée sont précisés (articles 7 et 8).
2° La formation des agents au cours de leur contrat (chapitre III)
L’agent bénéficie pendant son contrat d’un parcours de formation adapté pour se présenter aux épreuves du concours correspondant au niveau du poste occupé. Ce parcours de formation tient compte du niveau de diplôme de l’agent et de la nature du concours préparé (article 10).
Le présent décret définit les organismes de formation qui peuvent assurer cette préparation et précise que la durée du parcours de formation est comprise entre dix et vingt-cinq pour cent de la durée totale du contrat avec une possibilité de l’étendre si cela est nécessaire.
Le tuteur de l’agent doit être en fonction au sein de son service d’affectation et ne peut exercer des fonctions de tutorat à l’égard de plus de deux agents, dans le cadre de dispositif ou dans un autre (article 11).
3° Les modalités de gestion des agents au cours de leur contrat PRAB (chapitre IV)
Le contrat PRAB comporte une période d’essai de deux mois renouvelable une fois. Au cours de cette période, l’autorité investie du pouvoir de recrutement peut librement mettre fin au contrat sans préavis ni indemnité. De même, l’agent peut librement mettre fin à son contrat sans préavis (article 15).
Pendant la durée de son contrat, l’agent est soumis à la durée du travail effectif applicable dans le service dans lequel il est affecté. Il ne peut effectuer de travaux supplémentaires. La durée du temps passé en formation est assimilée à du temps de travail effectif (article 12). Il peut solliciter pour raisons de famille un congé sans rémunération dans la limite de quinze jours par an (article 14).
La rémunération de l’agent est équivalente à celle qui serait versée à un fonctionnaire stagiaire issu du concours externe pour l’accès au corps ou au cadre d’emplois correspondant au poste occupé. Elle évolue de la même façon (article 13).
4° Les dispositions diverses (chapitre V)
Le présent décret établit une règle d’assimilation de services effectifs pour les bénéficiaires de ces contrats (article 17).
Un bilan de cette expérimentation sera communiqué tous les ans à compter de 2019 aux comités techniques compétents ainsi qu’au Conseil commun de la fonction publique. Au cours de l’année 2023, une évaluation sera réalisée dans des conditions définies par un arrêté conjoint des ministres chargés de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière (article 18).
CE, 27 septembre 2017, n° 404475
M. B. a candidaté au poste de professeur en archéologie médiévale et patrimoine vacant à l'université de Lorraine.
Le comité de sélection de l'université a décidé par une délibération du 4 mai 2016, après avoir pris connaissance des deux rapports consacrés à la candidature de M. B. de ne pas l'auditionner.
M. B. étant le seul candidat, le comité de sélection n'a, en conséquence, pas établi de liste de candidats auditionnés, ni a fortiori de liste de candidats retenus, ni transmis d'avis favorable au conseil d'administration de l'université.
Le conseil d'administration de l'université, réuni en formation restreinte, a, par une délibération en date du 31 mai 2016, pris acte de cette délibération du comité de sélection.
M. B. a demandé, sans succès, au président de l'université à ce que le comité de sélection délibère à nouveau sur sa candidature.
M. B. a alors saisi le Conseil d’État.
Il soutenait notamment que les votes du comité de sélection de l'université sur sa candidature n’avaient pas été régulièrement comptabilisés.
Le Conseil d’État, après avoir rappelé les dispositions de l'article 9-2 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences, a considéré que :
« chaque fois que le comité de sélection, qui a la qualité de jury de concours, statue sur une candidature individuelle, soit pour décider ou non de procéder à l'audition du candidat, soit pour statuer sur sa candidature à l'issue de son audition, une éventuelle abstention doit être regardée comme traduisant un vote défavorable ; que, dans tous les cas, le président a voix prépondérante en cas de partage des voix ».
En l’espèce, lors du vote au cours duquel le comité de sélection s'est prononcé sur son souhait d'entendre ou non M. X, quatre membres sur huit ont voté en faveur de l'audition, un membre s'est abstenu et trois membres, dont le président du comité, ont voté contre l'audition.
Ainsi en refusant, à l'issue de ce vote, d'auditionner le requérant, le comité de sélection de l'Université de Lorraine a fait une exacte application des dispositions de l'article 9-2 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 précité.
La requête de M. B. a donc été rejetée.
CE, 16 octobre 2017, n° 383459
M.E., candidat aux épreuves du concours interne d’accès au corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts au titre de 2014, demande au Conseil d’État l'annulation de la délibération du jury de ce concours fixant la liste des candidats admis et leur décret de nomination et de titularisation.
M.E. soutient, d’une part, que certains candidats ont été favorisés par le jury du concours au motif qu'ils étaient issus des "aires urbaines" de Paris ou de Lyon.
Le Conseil d’État accepte d’examiner les éléments statistiques produits par M. E., mais les considère insuffisamment probants.
En effet il écarte ce moyen, au motif que ni la circonstance que les membres du jury avaient leur résidence administrative dans l'une ou l'autre de ces deux zones géographiques, ni le fait que le taux d'admission sur liste principale et complémentaire des vingt-et-un candidats admissibles qui résidaient dans l'une ou l'autre de ces deux zones géographiques s'élève à 57,14 %, alors que ce taux n'est que de 16,67 % pour les douze admissibles qui n'y résidaient pas, ne sont de nature à faire présumer une atteinte au principe d'égalité de traitement.
M. E. soutient, d’autre part, que le jury a illégalement introduit dans son appréciation un critère lié à l'âge des candidats. Selon lui, la probabilité qu'aucun des dix candidats âgés de plus de trente-cinq ans déclarés admissibles ne figure sur la liste des admis n'avait, eu égard au nombre des admissibles et des admis, qu'une chance sur mille de se produire.
La haute juridiction considère que « ce calcul, qui repose sur plusieurs hypothèses statistiques non établies quant à la valeur des candidats, ne constitue pas en l'espèce, compte tenu, en outre, du petit nombre de candidats sur lequel repose ce calcul de probabilités, une circonstance susceptible de faire présumer une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats à ce concours ».
Les requêtes de M. E. sont donc rejetées.
CJUE, 18 octobre 2017, n° C-409/16
Par décision du chef de la police hellénique, un avis de concours d’admission à l’école de police grecque a été publié pour l’année académique 2007-2008. Cet avis reprenait une disposition de la loi grecque, qui prévoit que tous les candidats, indépendamment de leur sexe, doivent mesurer au minimum 1,70 mètre.
La requérante Mme K. s’est vu refuser sa demande de participation au concours d’entrée à l’école de police, au motif qu’elle n’atteignait pas la taille prévue.
Elle a alors introduit un recours devant la cour administrative d’appel d’Athènes contre cette décision, estimant avoir subi une discrimination fondée sur le sexe. Celle-ci a fait droit à sa demande en déclarant que la loi grecque n’était pas conforme au principe constitutionnel d’égalité entre les hommes et les femmes.
Le ministre grec de l’Intérieur et le ministre grec de l’Éducation nationale et des Cultes ont fait appel de cette décision devant le Conseil d’État grecque.
Celui-ci demande à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) si le droit de l’Union s’oppose à une réglementation nationale fixant une taille physique minimale identique pour tous les candidats, de sexe masculin ou féminin, au concours d’admission à l’école de police.
La CJUE constate que la fixation d’une taille physique minimale identique pour tous les candidats, de sexe masculin ou féminin, constitue une discrimination indirecte dès lors qu’elle désavantage un nombre beaucoup plus élevé de personnes de sexe féminin que de personnes de sexe masculin.
Toutefois, une telle réglementation ne constitue pas une discrimination indirecte interdite lorsque deux conditions, dont l’existence est à vérifier par le juge national, sont remplies : d’une part, il faut que la réglementation soit objectivement justifiée par un but légitime, tel que celui d’assurer le caractère opérationnel et le bon fonctionnement des services de police, d’autre part, il faut que les moyens pour parvenir à ce but soient appropriés et nécessaires.
La CJUE ajoute que s’il est vrai que certaines fonctions de police peuvent exiger l’utilisation de la force physique et impliquer une aptitude physique particulière, il n’en demeure pas moins que d’autres fonctions, telles que l’assistance aux citoyens ou la régulation de la circulation, ne nécessitent apparemment pas un engagement physique important.
Par ailleurs, même à supposer que la totalité des fonctions exercées par la police hellénique requière une aptitude physique particulière, une telle aptitude n’est pas nécessairement liée à la possession d’une taille physique minimale. En tout état de cause, l’objectif de garantir l’accomplissement effectif de la mission de la police pourrait être atteint par des mesures moins désavantageuses pour les femmes, telles qu’une présélection des candidats permettant de vérifier leurs capacités physiques.