CE, 15 septembre 2017, n° 411637
Le Conseil d’État a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions du I de l'article 4 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique. Celles-ci prévoient, à titre dérogatoire, en vue de résorber l'emploi précaire dans la fonction publique, un mode de recrutement réservé à certains agents contractuels de droit public, notamment subordonné à une condition de réalisation de quatre années de services publics effectifs en équivalent temps plein accomplies auprès d’un département ministériel, d’une autorité publique ou d’un établissement public.
La requérante, Mme T., soutenait que ces dispositions méconnaissaient le principe d'égal accès à l'emploi public garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'elles créent une discrimination injustifiée au regard des objectifs de cette loi, entre les agents contractuels de l'État selon qu'ils ont effectué l'ensemble de leurs services antérieurs au sein d'établissements d'enseignement publics ou, en partie, au sein d'établissements d'enseignement privés sous contrat d'association, notamment en étant employés en tant que maîtres délégués.
Le Conseil d’État, après avoir rappelé certaines dispositions réglementaires relatives aux enseignants des classes sous contrat d'association, a considéré que ces enseignants employés comme maîtres auxiliaires ou maîtres délégués sont affectés indifféremment par les recteurs d'académie dans des établissements d'enseignement publics ou privés sous contrat d'association en fonction des besoins.
Ces enseignants sont, lorsqu'ils exercent leurs fonctions dans un établissement d'enseignement privé, rémunérés directement par l'Etat. Ils occupent des emplois retracés au budget du département ministériel charge de l’éducation. Aussi doivent-ils être regardés comme ayant pour employeur l'État et comme servant au sein du département ministériel de l'éducation au sens des dispositions attaquées.
« Dès lors, les services d'enseignement qu'ils ont accomplis auprès d'établissements d'enseignement privés sous contrat d'association ne peuvent être exclus des services pris en compte pour l'appréciation de la condition d'ancienneté posée par ces dispositions pour l'accès aux concours réservés ».
Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme T.
CE, 22 septembre 2017, n° 401364
M. A. a été recruté en 1992 au sein d’une des directions du ministère de la défense en qualité d'agent contractuel pour occuper un poste d'ingénieur du corps technique. En 2003, il a été affecté au service d’une autre direction du même ministère en qualité de directeur des systèmes d'information puis, en 2007, il change à nouveau de direction et occupe les fonctions de chef du département achats. Il a sollicité en 2008 son reclassement à compter du 1er mars 2003 dans la position « III C » correspondant à des fonctions de direction. Cette demande a été refusée par l’administration par une décision du 9 janvier 2009.
Estimant que son contrat conclu en 1992 était entaché d'irrégularité, M. A. en a demandé la régularisation par un courrier à la suite duquel une proposition de nouveau contrat de travail lui a été faite. M. A. a refusé de signer ce nouveau contrat. Il a alors demandé à l'administration de prononcer son licenciement.
L’administration a implicitement rejeté cette demande, puis a finalement procédé à son licenciement disciplinaire à compter du 1er décembre 2012.
M. A. a demandé, sans succès, au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, puis à la cour administrative d'appel de Versailles, l’annulation de ces différentes décisions. Il a alors formé un pourvoi en cassation.
Le Conseil d’État a tout d’abord précisé « que, sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci ; que, lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel en cause, l'administration est tenue de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuive régulièrement ; que si le contrat ne peut être régularisé, il appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation ; que si l'intéressé refuse la régularisation de son contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible, l'administration est tenue de le licencier ».
La haute juridiction ajoute que « lorsqu'elle n'implique la modification d'aucun de ses éléments substantiels, l'administration procède à la régularisation du contrat de l'agent, sans être tenue d'obtenir son accord ; que, dès lors, si l'agent déclare refuser la régularisation à laquelle a procédé l'administration, ce refus n'y fait pas obstacle et l'administration n'est pas tenue de licencier l'agent ».
En l’espèce, la cour administrative d'appel de Versailles n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l'administration n'était pas tenue de licencier M. A. : la régularisation à laquelle elle a procédé ne portait pas sur des éléments substantiels du contrat.
En outre, la cour administrative d'appel de Versailles n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant que les fonctions qu’il occupait de 2003 à 2007 ne justifiaient pas de reclassement dans la position « III C » correspondant à des fonctions de direction.
Le pourvoi de M. A. est rejeté.