La négociation d’accords collectifs, une tendance qui s’affirme dans les fonctions publiques

Paru dans le N°20 - Décembre 2019
DOSSIER

À l’heure où la France s’apprête à renforcer le dispositif de la négociation collective dans la Fonction publique afin « d’améliorer la gestion des ressources humaines et les conditions de travail », il est intéressant d’observer l’utilisation de cet outil du dialogue social au-delà de nos frontières. Quels pays l’ont mis en place ? Le cas échéant pour quelle(s) catégorie(s) d’agents publics, voire pour  quelles professions ? Quels sont les domaines couverts par les accords ou conventions ?

Si dix-sept pays de l'Union européenne1 ont, à ce jour, ratifié la convention n° 151 de l’OIT relative aux relations de travail dans la fonction publique et dont l’article 7 vise expressément le développement de la négociation collective2, on constate que les pratiques restent encore très variées.

En Allemagne, les « Tarifverträge » sont trisannuels et négociés à l’échelon fédéral ou de chacun des 16 États fédérés, entre l’Administration et les syndicats. Ils concernent les seuls agents sous contrat (60% des effectifs) et portent essentiellement sur les grilles de rémunération et le temps de travail. À noter : même s’il n’y a aucune obligation de transposition, le résultat de l’accord sert souvent de référence pour l’évolution du régime applicable aux personnels fonctionnaires.

Au Canada, le Secrétariat du Conseil du Trésor est chargé d‘assurer le renouvellement des 27 conventions collectives sectorielles avec pour interlocuteurs des agents négociateurs accrédités. Des procédures d’arbitrage et de conciliation sont prévues pour régler les différends et parvenir à un compromis. Les conventions ne peuvent toutefois directement ou indirectement modifier ou supprimer des conditions d'emploi existantes, ni en établir de nouvelles, domaine qui relève de la Loi.

En Espagne, le processus de contractualisation ainsi que les restructurations organisationnelles ont entraîné, au fil des années, une démultiplication du nombre de « Convenio colectivo » qui s’appliquent au personal laboral (contractuels, majoritaires dans l’emploi public) et le Gouvernement a entrepris depuis une vaste opération de regroupement pour harmoniser la gestion.  Elles peuvent porter sur de nombreux sujets à l’exception des retraites.

En Italie, une agence nationale (ARAN) est chargée de la négociation de tous les accords. Tous les employeurs publics (État, provinces, communes) participent à son financement et y sont regroupés au sein de 12 collèges sectoriels. Dans ce pays où 85 % des agents publics sont sous contrat, cette institution indépendante joue un rôle central sur le plan du dialogue social qui peut porter sur tout excepté la santé et la sécurité au travail.  Elle bénéficie d’une large autonomie d’organisation et de gestion. 

Au Royaume-Uni, la négociation collective s'appuie sur un cadre législatif universel, qui ne fait pas de distinction entre les salariés des  secteurs public et privé. Cependant, des dispositions spécifiques négociées, les « Pay review bodies », encadrent exclusivement la rémunération de sept catégories d’employés publics3.

En Irlande, aux Pays-Bas (dont le statut des agents change au 1er janvier 2020) comme dans les pays scandinaves, les accords collectifs, qu’ils soient nationaux, régionaux ou locaux, sont le reflet d’une longue tradition et concernent la quasi-totalité des personnels.

Certains pays, comme la Grèce, le Portugal ou la Slovénie disposent également d’un cadre juridique propre au secteur public, mais le nombre d’accords signés y reste assez limité.

1 Belgique, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie et Suède.

2 « Des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d'agents publics, ou de toute autre méthode permettant aux représentants des agents publics de participer à la détermination desdites conditions ».

3 Forces armées, médecins et dentistes, infirmiers et autres professions de santé, personnel des services pénitentiaires, enseignants et professeurs, hauts fonctionnaires.


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