Les modalités du détachement d’office des fonctionnaires dans les trois versants de la fonction publique sont précisées par décret

Paru dans le N°123 - Juin-juillet-août 2020
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La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, en son article 76, créé un dispositif de détachement d’office à l’article 15 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Ainsi, lorsqu’une activité d’une personne morale de droit public employant des fonctionnaires est transférée à une personne morale de droit privé ou à une personne morale de droit public gérant un service public industriel et commercial (SPIC), des fonctionnaires exerçant cette activité peuvent être détachés d’office, sur un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) auprès de l’organisme d’accueil, pendant la durée du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil.

Cette disposition permet de faciliter les opérations d’externalisation en assurant à la fois la continuité dans l’exercice des missions et le réemploi des fonctionnaires au sein d’un nouvel organisme.


Le décret n° 2020-714 du 11 juin 2020, pris en application de l’article 15 de la loi du 13 juillet 1983 précitée, fixe les modalités du détachement d’office dans les trois versants de la fonction publique. Il modifie à ce titre :
  • Pour la fonction publique de l’Etat, le décret n° 85986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions ;
  • Pour la fonction publique territoriale, le décret n° 8668 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration ;
  • Pour la fonction publique hospitalière, le décret n° 88976 du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, à l'intégration et à certaines modalités de mise à disposition.
Le décret précise que le détachement d’office d’un fonctionnaire est prononcé par arrêté du ministre, par décision de l’autorité territoriale ou par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination dont il relève.

Le décret prévoit que le fonctionnaire est informé de ses conditions d’emploi et de rémunération au sein de l’organisme d’accueil par son administration au moins trois mois avant la date de son détachement. Par ailleurs l’administration doit lui communiquer la proposition de contrat de travail au sein de l’organisme d’accueil au moins huit jours avant la date du détachement.

Le décret prévoit également les dispositions applicables dans le cas où l’activité d’un service est transférée mais où l’emploi d’un fonctionnaire exerçant ses missions dans ce service n’est pas transféré. Dans la fonction publique de l’Etat et la fonction publique hospitalière, il est prévu que ce fonctionnaire soit affecté sur un emploi vacant correspondant à son grade ; à défaut, il peut bénéficier des dispositifs individuels d’accompagnement prévus en cas de suppression d’emploi. Dans la fonction publique territoriale, le fonctionnaire bénéficie des dispositions prévus à l’article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, relatif au reclassement du fonctionnaire en cas de perte d’emploi.

Le décret comprend des dispositions visant à prendre en compte les enjeux déontologiques du détachement d’office. Ainsi, le détachement ne peut être prononcé qu’une fois que l’autorité hiérarchique dont relève le fonctionnement s’est assurée de la compatibilité de l’activité envisagée au sein de l’organisme d’accueil avec les fonctions qu’il a exercées au cours des trois dernières années. En cas de doute sérieux, l’autorité hiérarchique doit recueillir préalablement l’avis du référent déontologue ou, le cas échéant, celui de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) dans les conditions prévues par le décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique (Vigie n° 119 – janvier 2020). Par dérogation à ce décret, il n’est pas nécessaire que le fonctionnaire concerné adresse lui-même la demande donnant lieu à ces avis.

L’article 15 de la loi du 13 juillet 1983 précitée dispose que le contrat de travail avec l’organisme d’accueil doit prévoir une rémunération au moins égale à la rémunération antérieurement versée par l’administration ou l’établissement d’origine. De plus, cette rémunération ne peut être inférieure à celle versée pour les mêmes fonctions aux salariés de l’organisme d’accueil. Le décret précise ces dispositions, indiquant que la rémunération du fonctionnaire détaché d’office est égale à la rémunération annuelle brute la plus élevée correspondant :
  • Soit à la rémunération brute perçue au cours des douze derniers mois précédant la date de son détachement. Le décret précise que, dans ce cas, sont exclus de cette rémunération :
    • Pour la fonction publique de l’Etat et la fonction publique hospitalière : les indemnités représentatives de frais, les indemnités liées au dépassement effectif du cycle de travail, les versements exceptionnels ou occasionnels motivés par un fait générateur unique (à l’exception de l’indemnité dite de garantie individuelle du pouvoir d’achat) et les indemnités versées au titre d’une activité accessoire.
    • Pour la fonction publique territoriale : les indemnités représentatives de frais, les indemnités liées au dépassement effectif du cycle de travail, les primes et indemnités liées au changement de résidence, à la primo-affectation ou à la mobilité géographique et les indemnités d’enseignement ou de jury ainsi que les autres indemnités non directement liées à l’emploi
  • Soit à la rémunération brute annuelle perçue par un salarié ayant la même ancienneté et exerçant les mêmes fonctions au sein de l’organisme d’accueil ou qu’il percevrait au titre des conventions ou accords collectifs applicables au sein de cet organisme.
L’article 15 de la loi du 13 juillet 1983 précitée prévoit que, en cas de renouvellement du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, le détachement du fonctionnaire est renouvelée d’office. Ce renouvellement est prononcé pour la durée du contrat liant la personne publique à l’organisme d’accueil, par arrêté du ministre dont relève le fonctionnaire ou par décision de l’autorité territoriale ou de l’autorité investie du pouvoir de nomination. Le fonctionnaire est informé de ce renouvellement par l’administration au plus tard trois mois avant l’échéance de ce contrat.

La loi du 13 juillet 1983 contient également des dispositions concernant la conclusion d’un nouveau contrat entre l’administration d’origine et un autre organisme d’accueil. Dans ce cas, le fonctionnaire est détaché d’office auprès du nouvel organisme d’accueil et celui-ci est tenu de reprendre les clauses substantielles du CDI précédemment conclu, notamment celles relatives à la rémunération. Le décret précise que le fonctionnaire doit être informé de ce détachement d’office par son administration d’origine au plus tard trois mois avant la date du précédent contrat.


Le décret identifie plusieurs cas de figures dans lesquels le détachement d’office prend fin.

Le fonctionnaire peut demander à tout instant à ce qu’il soit mis fin à son détachement pour occuper un emploi au sein d’une administration mentionnée à l’article 2 de la loi du 13 juillet 1983 précitée. Dans ce cas, il doit respecter un délai de prévenance d’au moins un mois.

Le détachement d’office prend également fin si le fonctionnaire demande à bénéficier d’un nouveau détachement ou à être placé en disponibilité ou en congé parental.

Si le CDI est rompu à son initiative ou d’un commun accord avec l’organisme d’accueil pour une raison autre que celles évoquées dans le paragraphe précédent, le détachement d’office prend fin. Dans ce cas et dans la fonction publique de l’Etat et la fonction publique hospitalière, le fonctionnaire est placé en disponibilité. Dans la fonction publique territoriale, il est réintégré dans son cadre d’emploi d’origine, le cas échéant en surnombre, dans les conditions de l’article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée.

Le détachement prend fin si le fonctionnaire demande à être radié des cadres par son administration ou son établissement d’origine. Dans la fonction publique de l’Etat et la fonction publique hospitalière, il perçoit dans ce cas une indemnité de départ volontaire, versée par son administration ou son établissement d’origine, sauf s’il est à moins de deux ans de l’âge d’ouverture de ses droits à la retraite. Dans la fonction publique territoriale, le fonctionnaire dans cette situation perçoit une indemnité égale à un douzième de la rémunération brute annuelle perçue par l’agent au cours de l’année civile précédant celle du dépôt de la demande de radiation des cadres, multiplié par le nombre d’années échues de service effectif dans l’administration, dans la limite de vingt-quatre fois un douzième de sa rémunération brute annuelle. Sont exclues du calcul de la rémunération brute annuelle les primes et indemnités qui ont le caractère de remboursement de frais, les majorations et indexations relatives à une affection outre-mer, l’indemnité de résidence à l’étranger, les primes et indemnités liées au changement de résidence, à la primo-affectation et à la mobilité géographique, les indemnités d’enseignement ou de jury ainsi que les autres indemnités non directement liées à l’emploi.

Enfin, le détachement d’office prend fin si le fonctionnaire est licencié par son organisme d’accueil. Dans ce cas, il est réintégré dans son corps ou cadre d’emplois d’origine, le cas échéant en surnombre et, pour la fonction publique territoriale, dans les conditions prévues à l’article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée. Dans cette situation, le fonctionnaire ne perçoit pas d’indemnité de licenciement. L’organisme d’accueil doit informer l’administration du licenciement du fonctionnaire trois mois avant la date effective de celui-ci.


Le décret fixe enfin les choix qui s’offrent au fonctionnaire à la fin de son contrat avec l’organisme d’accueil, s’il n’y a ni renouvellement du contrat ni passation d’un nouveau contrat. Ainsi, il peut demander :
  • sa réintégration dans son corps ou cadre d’emplois d’origine, le cas échéant en surnombre ;
  • le cas échéant, son placement dans une autre position conforme à son statut ;
  • sa radiation des cadres prononcée par l’administration ou l’établissement d’origine. Dans ce cas, le fonctionnaire de l’Etat ou hospitalier perçoit l’indemnité de départ volontaire, et le fonctionnaire territorial perçoit l’indemnité décrite plus haut, que le fonctionnaire perçoit si son détachement prend fin parce qu’il demande à être radié des cadres.
Si le fonctionnaire n’exprime pas son choix avant le terme du contrat, il est réputé avoir choisi sa réintégration dans son corps ou cadre d’emplois d’origine.

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