Instauration d’un état d’urgence sanitaire permettant de fonder toute mesure réglementaire ou individuelle limitant certaines libertés afin de lutter contre l’épidémie et, lorsque nécessaire, de légiférer par ordonnances dans les domaines relevant strictement de la gestion de crise

Paru dans le N°121 - Avril 2020
Statut général et dialogue social

Le 16 mars, le Président de la République s'adressait, pour la deuxième fois, aux Français pour évoquer la crise sanitaire sans précédent provoquée par l’épidémie de Covid-19.

À cette occasion, il a annoncé le report du second tour des élections municipales initialement programmé pour le 22 mars, la mise en œuvre, à compter du lendemain 12 heures et sur l'ensemble du territoire, des mesures renforcées pour réduire les déplacements et les contacts au strict nécessaire et, enfin, un certain nombre de mesures de soutien à l'économie ainsi qu'un projet de loi « permettant au Gouvernement de répondre à l’urgence et, lorsque nécessaire, de légiférer par ordonnances dans les domaines relevant strictement de la gestion de crise ».

Le 21 mars, dans son discours de présentation du projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, le Premier ministre a rappelé que ces mesures étaient temporaires et devaient être strictement limitées dans le temps : « Elles ne font pas précédent et ne remettent en aucun cas en cause les fondements de notre démocratie sociale ou notre attachement au dialogue social ».

Saisi le 17 mars du projet de loi d’urgence, le Conseil d’Etat a notamment estimé que « l’existence d’une catastrophe sanitaire rend utile un régime particulier de l’état d’urgence pour disposer d’un cadre organisé et clair d’intervention en pareille hypothèse ». Il a précisé que « l’état d’urgence sanitaire, caractérisé non plus par une menace mais par une catastrophe sanitaire avérée, ouvre quant à lui au Premier ministre la possibilité de prendre les mesures les plus restrictives pour les libertés et de procéder aux réquisitions ». Le Conseil d’Etat a rappelé que « le projet de loi prévoit que toutes ces mesures sont proportionnées aux risques encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il donne au Premier ministre le pouvoir de prendre par décret les mesures générales limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tous biens et services ». Le Conseil d’Etat constate enfin que « le projet de loi habilite le Gouvernement à prendre, dans un délai de trois mois, une série d’ordonnances pour faire face à l’urgence sanitaire. Le Conseil d’Etat relève que l'urgence est au nombre des justifications que le Gouvernement peut invoquer pour recourir à l'article 38 de la Constitution (CC, n° 99-421 DC du 16 décembre 1999, cons. 13) ».

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a été publiée au Journal officiel le 24 mars 2020, jour de son entrée en vigueur.

Cette loi comporte quatre objectifs : protéger la population française, sauver l’économie de la France, adapter provisoirement les règles de droit aux bouleversements occasionnés par cette crise en matière économique, sociale ou administrative, et, enfin, organiser le report du second tour des élections municipales.

Ainsi, le titre Ier de cette loi instaure un dispositif d’état d’urgence sanitaire. En raison de la gravité de la catastrophe sanitaire induite par la propagation du coronavirus, il est créé, dans le Code de la santé publique, un régime d’état d’urgence sanitaire, pour deux mois, qui permet de fonder toute mesure réglementaire ou individuelle limitant certaines libertés afin de lutter contre l’épidémie.

L’article 4 prévoit que la prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà de cette durée de deux mois ne peut être autorisée que par la loi. Ainsi, l’état d’urgence sanitaire a-t-il été prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 inclus par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

L’article 8 suspend par ailleurs l’application du délai de carence dans tous les régimes à compter du 24 mars 2020 et jusqu’au terme de l’état d’urgence sanitaire déclaré.

Le titre II comporte les habilitations nécessaires pour prendre par ordonnances les mesures économiques et sociales temporaires que l’urgence impose pour lutter contre lépidémie de Covid-19.

L’article 11 autorise notamment le Gou­ver­ne­ment à pren­dre, par ordonnances, toute mesure rele­vant du domaine de la loi, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, pouvant entrer en vigueur rétroactivement au 12 mars 2020 si nécessaire.

Dans le domaine de la fonction publique, les ordonnances visent notamment à :
  • permettre à tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait et des jours de repos affectés sur le compte épargne temps de l’agent, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d’utilisation définis, notamment par le statut général de la fonction publique ;
  • aménager les modalités de l’exercice par les services de santé au travail de leurs missions de suivi de l’état de santé des travailleurs ;
  • adapter les modalités d'information et de consultation des instances de dialogue social ;
  • déroger aux dispositions de l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, relatives à la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics ;
  • modifier les règles de délais de procédure et de jugement de la juridiction administrative ;
  • modifier les modalités d’accès aux formations de l’enseignement supérieur, de délivrance des diplômes de l’enseignement supérieur ainsi que de déroulement des concours ou examens d’accès à la fonction publique ;
  • déroger aux règles de fonctionnement budgétaire des collectivités territoriales et des établissements publics locaux.
Enfin, le titre III concerne le report du second tour des élections municipales.

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