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Quelles instances de dialogue social après la loi de transformation de la fonction publique ?

Temps de lecture  8 minutes

Par : La Rédaction

La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique consacre son premier volet au dialogue social. Les instances représentatives du personnel (CAP, comités techniques, CHSCT) sont revues. Parallèlement, des "lignes directrices de gestion" sont instaurées.

Le droit à la participation des fonctionnaires à la détermination de leurs conditions de travail s’exerce dans des instances de dialogue social. L'article 1er de la loi de transformation de la fonction publique réaffirme ce principe de participation.

L'évolution des CAP

Le rôle des CAP est recentré

Les attributions des commissions administratives paritaires (CAP), composées de représentants de l'administration et du personnel, sont recentrées sur l'examen des décisions individuelles défavorables aux agents (refus de titularisation, de licenciement, de formation, de temps partiel ou de télétravail, discipline, etc.).

Auparavant, les CAP donnaient un avis préalable sur les décisions individuelles de mutation, de mobilité, d'avancement et de promotion interne (détachement entrant, accueil en disponibilité, avancement de grade, etc.). Depuis le 1er janvier 2020, elles ne sont plus compétentes en matière de mutation et de mobilité, et, depuis le 1er janvier 2021, en matière d'avancement et de promotion.

Ce sont des lignes directrices de gestion (LDG) qui fixent dorénavant les orientations générales relatives aux mutations et aux mobilités dans la fonction publique de l'État et celles concernant les avancements et les promotions dans toute la fonction publique. Les décisions individuelles au titre de l'année 2021 doivent être prises sur le fondement des LDG.

Selon l'étude d'impact du projet de loi, ces lignes de gestion constituent "la doctrine de gestion en matière de promotions". Elles doivent fixer "les orientations générales et les grandes priorités en matière de promotion et de valorisation des parcours" et préciser "les critères d’appréciation comparée des mérites, expériences et acquis professionnels pris en compte pour l’inscription sur une liste d’aptitude ou sur un tableau d’avancement".

Le fonctionnaire, destinataire d'une décision défavorable concernant son avancement, une promotion ou sa mutation, peut faire appel au représentant syndical de son choix pour l'aider à former un recours administratif.

Un décret du 29 novembre 2019 définit les nouvelles compétences des CAP, l'autorité compétente pour édicter les lignes directrices de gestion dans chacune des trois fonctions publiques, leurs conditions d'élaboration et leur champ d'application.

Les lignes directrices de gestion sont établies pour une durée pluriannuelle maximum de cinq ans par les employeurs d'État et hospitaliers et pour une durée pluriannuelle maximum de six ans par les employeurs territoriaux. Elles sont révisables.

Dans les trois fonctions publiques, les lignes directrices de gestion doivent inclure une stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines qui définit "les enjeux et les objectifs" de la politique de l'administration.

Ce décret précise également les dispositions sur le représentant syndical.

La composition des CAP est revue

En décembre 2022, lors du prochain renouvellement général des instances, les CAP seront constituées dans la fonction publique d'État par catégorie hiérarchique (A, B et C) et non plus par corps de fonctionnaires (pour la catégorie B par exemple : secrétaires administratifs, techniciens, contrôleurs).

Afin de tenir compte des particularités de certaines professions, plusieurs CAP pourront être créées au sein d'une même catégorie. Par ailleurs, si les effectifs sont insuffisants, une même CAP pourra être compétente pour plusieurs catégories hiérarchiques dans les fonctions publiques d'État et territoriale.

Le principe selon lequel un fonctionnaire ne peut pas siéger dans une formation qui lui permet d'apprécier la manière de servir d'un agent d'un grade supérieur est supprimé dans les trois fonctions publiques en 2022.

Un décret du 20 novembre 2020 fixe, pour la fonction publique d'État, ces mesures. Il pose, par ailleurs, le principe de l'élection des représentants du personnel dans les CAP par internet (sauf dérogation par un vote à l'urne. Dans tous les cas, le vote peut aussi avoir lieu par correspondance). Un autre décret du 8 décembre 2020 est intervenu pour la fonction publique territoriale.

Les futures instances de dialogue social dans la fonction publique. La commission administrative paritaire (CAP),	une CAP pour chaque catégorie hiérarchique (A, B, C), compétente pour les décisions individuelles défavorables. Le comité social, fusion du comité technique et du CHSCT, compétent sur le fonctionnement et l’organisation des services, la protection de la santé et de la sécurité des agents, etc.

 

Le comité social, nouvelle instance unique de dialogue

Les comités techniques (CT) et les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sont réorganisés sur le modèle de la réforme adoptée en septembre 2017 dans le secteur privé. Ils sont fusionnés en une instance unique : le comité social. Cette réorganisation doit permettre "de remédier à la difficulté d’articulation actuelle des compétences entre les CT et les CHSCT, en particulier en matière de réorganisation de services".

Dans la fonction publique d'État, ces comités prennent le nom de comités sociaux d'administration, dans la fonction publique territoriale de comités sociaux territoriaux et dans la fonction publique hospitalière de comités sociaux d'établissement

Dans les administrations territoriales et les administrations l'État de plus de 200 agents, il est prévu la création, au sein des comités sociaux, d'une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT). En dessous de ces seuils, si des risques professionnels le justifient, une formation spécialisée pourra être également instituée. 

Un décret du 20 novembre 2020 détermine la composition, l'organisation et le fonctionnement des nouveaux comités sociaux dans la fonction publique d'État et des nouvelles formations spécialisées en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Les conditions de désignation de leurs membres sont, en outre, précisées. Le vote par voie électronique est généralisé, sauf dérogation.

Les comités sociaux, qui doivent être mis en place en 2022 à l'issue des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique, auront à connaître de nombreuses questions notamment :

  • le fonctionnement et l'organisation des services ;
  • l'accessibilité des services et la qualité des services rendus ;
  • l'égalité professionnelle ;
  • la protection de la santé, l'hygiène et la sécurité des agents ;
  • les orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines ;
  • les lignes directrices de gestion (LDG) en matière de mutation, de mobilité, de promotion interne et d'avancement de grade des agents.

Les lignes directrices de gestion, qui permettent de déterminer la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), seront adoptées par chaque administration employeur, après avis du comité social. Elles seront communiquées aux agents. Leur mise en oeuvre fera l'objet d'un bilan devant le comité social, sur la base des décisions individuelles prononcées.

À partir de 2021, le bilan social annuel élaboré par les administrations employeurs est remplacé par un rapport social unique. Ce document doit servir de support à un débat relatif à l'évolution des politiques des ressources humaines.

Dans l'attente de la mise en place des comités sociaux, certaines dispositions de la loi du 6 août 2019 sont, à titre transitoire, applicables aux comités techniques et aux CHSCT :

  • les comités techniques sont seuls compétents pour examiner l'ensemble des questions relatives aux projets de réorganisation de service ;
  • les comités techniques et les CHSCT peuvent être réunis conjointement pour l'examen des questions communes. Dans ce cas, l'avis rendu par la formation conjointe se substituera à ceux du CT et du CHSCT ;
  • les comités techniques sont compétents pour donner un avis sur les lignes directrices de gestion et sur le plan d'action pour l'égalité professionnelle entres les femmes et les hommes.

Le recours à la négociation renvoyé à une ordonnance

D'après l'étude d'impact du projet de loi, le cadre juridique de la négociation au sein de l’administration, étoffé depuis la loi 5 juillet de 2010 relative à la rénovation du dialogue social, s’est avéré jusqu'ici insuffisant. Le nombre d'accords collectifs conclus dans la fonction publique reste modéré. Le suivi même des accords connaît des pratiques diverses.

C'est pourquoi la loi du 6 août 2019 habilite le gouvernement à prendre par ordonnance toutes les mesures afin de favoriser, aux niveaux national et local, la conclusion d'accords négociés. "L'objectif est de promouvoir le rôle et la culture de la négociation et d’en développer la pratique, en particulier aux niveaux de proximité qui constituent le quotidien des agents, en vue de favoriser à tout niveau, y compris à l’échelle d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public hospitalier, social ou médico-social, la conclusion d’accords négociés".

C'est l'objet de l'ordonnance du 17 février 2021.