Le statut de fonctionnaire ne peut justifier des conditions d’emploi discriminatoires à l’égard des agents contractuels de droit public à durée déterminée placés dans une situation comparable

Paru dans le N°113 - Juin 2019
Agents contractuels de droit public

Un enseignant recruté par contrat de droit public à durée déterminée par le ministère de l’éducation nationale espagnole s’est vu refuser le bénéfice d’une prime d’ancienneté réservée aux fonctionnaires. Le tribunal provincial de Pampelune, saisi du litige qui l’oppose à son employeur, soumet à la CJUE la question préjudicielle suivante : la clause 4, point 1 de l’accord-cadre joint en annexe de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 doit-elle « être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui réserve le bénéfice d’un complément de rémunération aux enseignants employés dans le cadre d’une relation de travail à durée indéterminée en tant que fonctionnaires statutaires, à l’exclusion notamment des enseignants employés en tant qu’agents contractuels de droit public à durée déterminée » ?

La CJUE rappelle que la clause 4 de l’accord-cadre précité tend à interdire les discriminations dont les travailleurs à durée déterminée peuvent faire l’objet au regard des travailleurs à durée indéterminée. Sur le fondement de ces dispositions, il est interdit : « de traiter, en ce qui concerne les conditions d’emploi, les travailleurs à durée déterminée d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée placés dans une situation comparable, au seul motif qu’ils travaillent pour une durée déterminée, à moins qu’un traitement différent ne soit justifié par des raisons objectives ».

Pour écarter l’argumentation du gouvernement espagnol, la Cour énonce que le caractère statutaire ou contractuel de la relation de travail est sans incidence sur le champ d’application de l’accord-cadre. Il importe uniquement d’apprécier si les fonctionnaires et les agents contractuels exercent un travail identique ou similaire au sens de l’accord-cadre.

À cet égard, la Cour tient compte « d’un ensemble de facteurs, tels que la nature du travail, les conditions de formation et les conditions de travail, ces travailleurs peuvent être considérés comme se trouvant dans une situation comparable ». Estimant que les enseignants titulaires et contractuels se trouvent, en l’espèce, dans une situation comparable, la Cour vérifie alors si une raison objective est susceptible de justifier un traitement qui réserve aux seuls fonctionnaires le bénéfice d’une prime d’ancienneté, en l’excluant pour les agents contractuels de droit public justifiant de la même ancienneté que les premiers. Elle rappelle que les États membres « peuvent, en principe, sans contredire la directive 1999/70 et l’accord-cadre, prévoir des conditions d’accès à la qualité de fonctionnaires statutaires ainsi que les conditions d’emploi de tels fonctionnaires. Les États membres sont ainsi en droit de poser des conditions d’ancienneté pour accéder à certains emplois ou encore de restreindre l’accès à une promotion par la voie interne aux seuls fonctionnaires, dès lors que cela résulte de la nécessité de tenir compte d’exigences objectives relatives à l’emploi en question et étrangères à la durée déterminée de la relation de travail. Cependant, une condition abstraite et générale, selon laquelle une personne doit disposer du statut de fonctionnaire pour bénéficier d’une condition d’emploi telle que celle en cause au principal, sans que soient prises en considération, notamment, la nature particulière des tâches à remplir ni les caractéristiques inhérentes à celles-ci, ne correspond pas aux exigences rappelées [dans le] présent arrêt ». En conséquence, la Cour déclare que la réglementation espagnole n’est pas conforme à l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée.

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