Yvelines : à la sécurité sociale, on travaille libérés

A la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines, direction et salariés ont mis en place une nouvelle façon de travailler, inspirée des entreprises libérées.

    Une ribambelle d'arbres multicolores en papier sont accrochés aux murs des couloirs. On peut y lire de petits mots griffonnés par les salariés : « C'est ceux qui font qui savent » ou encore « Souriez, vous êtes apprécié ! »

    Difficile d'imaginer, en arpentant ces couloirs, que l'on se trouve non pas dans une start-up mais à Versailles, au siège de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Yvelines, avec ses 1 300 salariés et sa lourdeur administrative légendaire. Sauf que voilà... Dans les Yvelines, l'entreprise de statut privé qui remplit une mission de service public a opéré depuis 2016 un changement radical d'organisation, comme d'autres caisses et administrations. Elle adopte les principes de l'entreprise libérée, un mouvement né dans les années 1960 aux Etats-Unis et qui essaime ces dernières années sous l'influence notamment du professeur et auteur Isaac Getz*. Fini les codes de l'entreprise traditionnelle, les horaires rigides pour les salariés, les systèmes de validation sans fin, la pyramide des chefs. Place aux initiatives et aux « groupes d'intelligence collective » où chacun donne son avis.

    A Versailles, à la demande des salariés, un bureau avec tapis roulant a fait son apparition pour stimuler les neurones devant les écrans d'ordinateur. « Derrière les gadgets, un vrai travail est mené avec les salariés. Il y avait sept strates hiérarchiques, nous en avons supprimé deux », souligne Patrick Négaret, responsable de la CPAM des Yvelines, à l'origine des changements.

    L'absentéisme baisse

    Le climat social s'est apaisé, les salariés gagnent en autonomie, même sur la plate-forme téléphonique de la CPAM, à Poissy, où les tâches sont assez routinières. Désormais, les salariés, qui doivent traiter chaque jour 1 700 courriels et 2 000 appels d'usagers n'ont plus besoin d'inscrire leur nom sur une feuille pour prendre leur pause. « Je suis la première marche de l'entreprise, admet Corentin, téléconseiller de 23 ans, qui assure aimer son travail pour la première fois de sa vie. J'ai le temps de souffler, je choisis la gestion des plannings. Il n'y a plus de vigie comme ailleurs », poursuit le jeune homme, qui a déjà travaillé sur cinq plates-formes téléphoniques.

    Le travail des encadrants, lui aussi, évolue. Au prix, parfois, de quelques efforts. « J'arrête de surveiller, assure Sylvie Fénérol, responsable de la plate-forme de Poissy. Je me suis dégagée d'une multitude de tâches qui n'étaient pas les miennes. C'est plus valorisant pour moi et pour eux. »

    A Versailles comme à Poissy, des travaux sont en cours pour décloisonner les espaces de travail et supprimer les bureaux des chefs. Premier bilan : l'absentéisme pour maladie a baissé de près de 30 % en un an et le taux de « décroché de téléphone » mesuré à Poissy a bondi de 15 %.

    * «L'Entreprise libérée», Ed. Fayard.

    Structures pionnières