L'absence de prise en compte, pour un travail de nuit, de la qualité de travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante, constitue une discrimination

Paru dans le N°106 - octobre 2018
Politiques sociales

Mme Gonzalez Castro qui travaille comme gardienne de sécurité, a accouché le 8 novembre 2014 d'un enfant qu'elle a allaité. A compter de mars 2015, elle a exercé ses fonctions dans un centre commercial, selon un système de rotation variable et avec des journées de travail de 8 heures, certaines tranches horaires - qu'elle assurait seule -, étant effectuées la nuit. Elle a demandé un certificat médical attestant l'existence d'un risque pour l'allaitement présenté par son poste de travail.

La problématique soulevée par les questions préjudicielles de la juridiction espagnole portait en premier lieu sur l'interprétation de la notion de "travail de nuit" au sens de l'article 7 de la directive 92/85 aux termes duquel les travailleuses allaitantes ne doivent pas être tenues d'accomplir un travail de nuit au cours d'une certaine période consécutive à l'accouchement - sous réserve de la présentation d'un certificat médical qui en atteste la nécessité du point de vue de leur sécurité ou de leur santé -, dans le cas où une partie seulement des fonctions de la travailleuse était accomplie en horaires de nuit.

Pour la CJUE, la finalité de la directive est d'arrêter des "prescriptions minimales" et de renforcer la protection dont sont susceptibles de bénéficier les travailleuses notamment allaitantes, en consacrant le principe selon lequel elles ne sont pas tenues d'effectuer un travail de nuit lorsque celui-ci les expose à un risque pour leur santé ou leur sécurité. Par conséquent tout travail posté, même accompli en partie seulement en période nocturne doit permettre la qualification de "travailleur de nuit" au sens de la directive 2003/88.

Par ailleurs, la CJUE précise que le fait de ne pas évaluer le risque présenté par le poste de travail d'une travailleuse allaitante, conformément aux exigences de la directive 92/85, constitue une discrimination directe fondée sur le sexe au sens de la directive 2006/54. Ce manquement est susceptible de justifier un renversement de la charge de la preuve dans le cadre du litige soumis à la juridiction étatique, si la travailleuse avance des faits de nature à suggérer que l'évaluation du risque présenté par le poste de travail par l'employeur n'a pas comporté un examen spécifique prenant en compte sa situation individuelle.
 

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