CEDH, 28 novembre 2017, n° 70838/13
Paru dans le N°98 - Janvier 2018
Statut général et dialogue social
Deux professeurs de l’Université du Monténégro soutenaient que l’installation d’un système de vidéosurveillance dans leurs lieux d’enseignement constituait une atteinte à la vie privée. Ils soutenaient qu’il n’y avait eu aucun contrôle effectif sur les informations collectées et que la surveillance était illégale. L’Agence de protection des données personnelles, après la plainte des requérants, a estimé que cette mesure n’était pas conforme à la loi monténégrine sur la protection des données et a ordonné le retrait des caméras.
Les tribunaux monténégrins rejetèrent toutefois leur action en réparation, considérant qu’aucune question de vie privée ne se posait, car les amphithéâtres où Mme A.et M. M. enseignaient étaient des lieux publics.
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) rejete l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Gouvernement du Monténégro. Elle rappelle qu’elle a considéré dans sa jurisprudence antérieure que la « vie privée » pouvait inclure les activités professionnelles ou les activités qui ont lieu dans un contexte public. Elle observe que les amphithéâtres universitaires sont les lieux de travail des professeurs, où ceux-ci non seulement enseignent, mais aussi interagissent avec les étudiants, développent des relations avec autrui et forgent leur identité sociale. Elle estime que dans la situation de Mme A. et M. M. l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif au droit au respect de la vie privée et familiale, est donc applicable.
Sur le fond, la CEDH juge que la vidéosurveillance constitue une ingérence dans l’exercice par les requérants de leur droit à la vie privée et que les éléments de preuve montrent que cette vidéosurveillance méconnait les dispositions du droit interne, celle-ci n’ayant pas été prévue par la loi.