CE, 24 mai 2017, n° 389785

Paru dans le N°92 - Juin 2017
Statut général et dialogue social

Mme B., alors adjointe de sécurité à la police de l'air et des frontières, a co-signé un ouvrage publié en 2010 imputant à cette institution un certain nombre d'abus. Cet ouvrage a fait l’objet d’une couverture médiatique importante. Le ministre de l'intérieur s'est fondé sur ce comportement, qu'il a qualifié de manquement à l'obligation de réserve, pour suspendre l'intéressée de ses fonctions pour une durée de dix-huit mois, dont douze assortis du sursis par un arrêté du 26 juillet 2011.

Le tribunal administratif de Paris, saisi par Mme B, a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision ainsi que sa demande d'indemnité.  

La cour administrative d'appel de Paris a confirmé ce jugement au motif que Mme B. avait délibérément manqué à son obligation de réserve en co-signant et en promouvant dans les médias un ouvrage portant de graves accusations contre le service de police au sein duquel elle était affectée et contre la politique gouvernementale en matière de police, « que ces accusations, souvent formulées de manière outrancière, étaient de nature à jeter le discrédit sur l'institution policière dans son ensemble ».

Pour sa défense, Mme B. se prévalait d’un " devoir d'alerte " pour justifier la publication de cet ouvrage, mais cet argument n’a pas été retenu par la cour administrative d’appel au motif  notamment qu’elle avait saisi le procureur de la République, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale que d'une partie seulement des faits qu'elle prétendait dénoncer dans cet ouvrage et qu’elle « ne démontre pas s'être trouvée dans l'impossibilité manifeste d'agir autrement que par la publication de ce livre, dont le contenu, comme la promotion qui en a été faite par ses soins dans les médias, procèdent par ailleurs d'une intention délibérément polémique ».

Mme B. s’est pourvue en cassation.

Le Conseil d’ État a considéré que l’arrêt de la cour administrative de Paris est suffisamment motivé et que cette dernière n'avait pas omis de répondre au moyen soulevé par Mme B. tiré de ce que l'intérêt général aurait exigé la divulgation des informations contenues dans l'ouvrage en cause.

De plus elle n'a pas commis l'erreur de droit alléguée dans l'application de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui protège la liberté d’expression.

Le ministre de l'Intérieur était fondé à prendre à son égard une sanction disciplinaire. Le pourvoi de Mme B. est donc rejeté.


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