La méconnaissance de l'article 6§2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à la présomption d'innocence ne saurait être invoquée dans le cadre d'une procédure contre une sanction disciplinaire

Paru dans le N°112 - Avril-Mai 2019
Statut général et dialogue social

Un médecin urgentiste a fait l’objet d’une radiation du tableau de l’ordre des médecins pour avoir provoqué délibérément la mort de plusieurs patients de l’unité du centre hospitalier dans lequel il officiait. Après rejet de son pourvoi par le Conseil d’Etat, l’intéressé a saisi la Cour européenne des droits de l’homme. Il a fait valoir d’une part, que les juridictions nationales ont fait preuve de partialité et ont méconnu, en conséquence, l’article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et d’autre part, qu’il ne pouvait pas être sanctionné disciplinairement dès lors que les sanctions pénales n’étaient pas établies, violant ainsi l’article 6§2 de la même convention relatif à la présomption d’innocence.
 
En premier lieu, la Cour rappelle que : « les décisions des chambres disciplinaires contiennent (…) des motifs retenus pour conclure à des manquements déontologiques et prononcer une sanction disciplinaire, à l’issue d’un débat contradictoire au cours duquel le requérant, assisté de son avocat, a pu faire valoir tous ses arguments. Elle constate ensuite, d’une part, qu’il entre précisément dans les attributions du Conseil d’État de reprendre les constats des juridictions du fond pour en apprécier la légalité et, d’autre part, que l’arrêt du Conseil d’État ne se borne pas, comme le prétend le requérant, à réitérer les motifs des juges disciplinaires, mais qu’il est au contraire longuement motivé, répondant précisément à chacun des moyens soulevés ».
 
En second lieu, la Cour réaffirme le principe selon lequel une procédure dirigée contre une sanction disciplinaire ne présente pas le caractère d’une action relative au bien-fondé d’une accusation pénale, de sorte qu’elle ne relève pas du champ de l’article 6 de la convention européenne. La cour relève qu’« en l’espèce, il ressort de la procédure disciplinaire, en particulier de l’arrêt du Conseil d’État, que les juges se sont tenus à la constatation des faits matériels – dont certains reconnus par le requérant – résultant des pièces du dossier disciplinaire, librement et contradictoirement débattues, et qu’ils se sont abstenus d’en tirer quelque qualification pénale que ce soit. Ainsi, les chambres disciplinaires et le Conseil d’État, en se fondant sur les dispositions pertinentes du code de la santé publique, ont su maintenir leurs décisions dans un domaine purement disciplinaire en lien avec des manquements déontologiques et étranger à la présomption d’innocence que le requérant invoque ».

En conséquence, la Cour rejette les deux griefs et déclare la requête irrecevable.

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